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>> sage.-WHITELOCKE. La plus prompte et la meil>> leure réponse serait, à coup sûr, l'apparition de >> votre Majesté dans son parlement. LE ROI. >> Passons là-dessus: permettez-moi, M. Hollis et >> M. Whitelocke, de vous prier d'entrer dans la

»

chambre voisine, d'y conférer un moment en>> semble, et de mettre par écrit ce qu'à votre sens >> je dois répondre à ce message, ce qui avancera >> le plus sûrement la bonne œuvre de la paix. — >> HOLLIS. Nous obéirons à l'ordre de votre Ma>> jesté. »

Ils passèrent tous deux dans la chambre désignée; et, après quelque hésitation, Whitelocke rédigea, mais en déguisant avec soin son écriture, l'avis que le roi leur demandait; puis, laissant le papier sur la table, ils revinrent dans l'appartement. Le roi entra seul dans la pièce dont ils sortaient, prit le papier, revint à son tour, traita fort gracieusement les deux commissaires, et se retira. Ils retournèrent aussitôt à leur auberge, et gardèrent avec leurs collègues un profond silence sur ce qui venait de se passer 1.

Trois jours après, le roi manda le comité, et remettant à lord Denbigh un papier cacheté et sans adresse: «Ceci, dit-il, est ma réponse; portez-la

Whitelocke, p. 108; Mémoires de Hollis, p. 55 et suiv.
Le 27 novembre 1644.

>> à ceux qui vous ont envoyés. >>> Surpris de cette forme inusitée et de trouver le roi si obstiné à ne point donner aux chambres le nom de parlement, le comte demanda la permission de se retirer un moment avec ses collègues, pour délibérer sur ce qu'ils avaient à faire. «Pourquoi délibérer? dit le >> roi; vous n'avez point de pouvoirs pour traiter; >> vous me l'avez dit vous-mêmes en arrivant, et je >> sais que depuis vous n'avez point reçu de cour>> rier. >>> Lord Denbigh insista, alléguant que le comité aurait peut-être des observations à présenter à sa Majesté. << Messieurs, dit vivement le roi, je >> recevrai tout ce que vous aurez à me dire de Lon>> dres, mais rien des imaginations et des chimères >> que vous avez pu amasser à Oxford: avec votre >> permission, vous ne m'attraperez pas. Sire, >> reprit le comte, nous ne sommes pas gens à at>> traper personne, encore moins votre Majesté. >> Je ne dis pas cela pour vous. - Que votre Majesté >> nous permette du moins de lui demander à qui >> ce papier est adressé. C'est ma réponse : je >> vous la remets, vous devez la prendre, fût-ce une >> chanson de Robin Hood. - L'affaire qui nous a >> amenés, Sire, est un peu plus grave qu'une chan» son. Je le sais; mais, je vous le répète, vous >> m'avez dit que vous n'aviez point de pouvoirs >> pour traiter; ma mémoire est aussi bonne que la >> vôtre; vous n'avez été chargés que de me remet

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>> tre les propositions : un postillon en eût fait au>> tant que vous. - J'espère que votre Majesté ne >> nous prend pas pour des postillons. - Je ne dis >> pas éela; mais, encore une fois, ceci est ma ré>> ponse; vous devez la prendre; je ne suis tenu à >> rien de plus. >> De moment en moment la conversation devenait plus aigre; Hollis et Pierpoint essayèrent en vain de faire dire au roi qu'il adressait aux deux chambres son message. Les commissaires se décidèrent enfin à le recevoir dans cette forme, et sortirent. Dans la soirée, M. Ashburnham, valet de chambre du roi, vint les trouver. «Sa Majesté >> s'ést aperçue, leur dit-il, que, dans un moment >> d'humeur, quelques paroles dont on pourrait >> s'offenser lui sont échappées; elle m'a ordonné >> de vous assurer que telle n'avait point été son in>> tention, et elle désire que vous en soyez bien >> convaincus. » Les commissaires protestèrent de leur respectueuse déférence aux paroles du roi, et reprirent la route de Londres, suivis d'un trompette chargé de recevoir la réponse du parlement au papier cacheté dont ils étaient porteurs 1.

1 Rushworth, part. 3, t. 2, p. 843; Parl. Hist., t. 3, col. 309312; Whitelocke, p. 110. Le rapport de lord Denbigh et le récit de Whitelocke, tous deux témoins oculaires, offrent en ceci des différences importantes, mais qui s'expliquent par le caractère officiel du premier de ces documents, évidemment concerté entre lės commissaires pour qu'il fût tel qu'il convenait aux chambres et à la situation (Parl. Hist., t. 3, col. 309: May, Hist. du LongParl., t. 2, p. 280, note 1).

Il ne contenait que la demande d'un sauf-conduit pour le duc de Richmond et le comte de Southampton, par qui le roi promettait d'envoyer sous peu de jours une réponse expresse et détaillée. Le saufconduit fut aussitôt accordé; et dès leur arrivée 1, les deux lords eurent audience. Ils n'apportaient encore aucune réponse; leur mission officielle se bornait à demander que des conférences fussent ouvertes, et des négociateurs nommés de part et d'autre pour traiter de la paix. Mais, ce message remis, ils restèrent à Londres; le bruit se répandit qu'une foule de gens suspects y arrivaient; plusieurs membres des chambres avaient avec les deux lords de fréquentes entrevues. Le conseil commun, où dominaient les indépendants, manifesta de vives inquiétudes. On engagea les deux lords à partir; ils tardèrent encore, sous de frivoles prétextes. L'agitation croissait; les passions du peuple menaçaient d'éclater plus tôt que ne pouvaient réussir les intrigues de parti. Pressés par les amis même de la paix, les deux lords retournèrent enfin à Oxford 3, et, trois semaines après leur départ, il fut convenü que quarante commissaires, vingt-trois au nom des parlements des deux royaumes, et dix-sept au nom du roi, se réuniraient à Uxbridge pour débattre régulièrement les conditions d'un traité 1.

1 Le 14 décembre 1644.

2 Le 16 décembre.

3 Le 24 décembre.

Mais, pendant que les presbytériens préparaient la paix, les indépendants s'emparaient de la guerre. Le 9 décembre, la chambre des communes s'était assemblée pour prendre en considération les souffrances du royaume, et y chercher quelque remède: nul ne demandait la parole; tous semblaient s'attendre à quelque mesure décisive dont chacun voulait éluder la responsabilité. Après un long silence, Cromvell se leva : « C'est maintenant le jour de >> parler, dit-il, ou il faut se taire à jamais. Il ne >> s'agit de rien moins que de sauver une nation >> tout ensanglantée, presque mourante, du déplo>> rable état où l'a déjà réduite la longue durée de >> la guerre. Si nous ne menons cette guerre de >> quelque façon plus énergique, plus rapide, plus >> efficace, si nous nous conduisons comme des sol>> dats de fortune sans cesse appliqués à faire filer >> la guerre, le royaume se lassera de nous, et >> prendra en haine le nom de parlement. Que di>> sent nos ennemis ? Bien plus, que disent beau>> coup de gens qui étaient nos amis à l'ouverture >> de ce parlement? Que les membres des deux

1 Rushworth, part. 3, t. 2, p. 844-846; Parl. Hist., t. 3, col. 315-320; Clarendon, Hist. of the Rebell., t. 7, p. 267,

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