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«Leur plus haute louange, disait Milton, n'est pas la flatterie, et leur plus simple avis est une sorte de louange. »>

Ineffable est l'union de Dieu et de l'homme dans chaque acte de l'âme. La plus simple personne qui, dans son intégrité, adore Dieu, devient Dieu elle-même; cependant les flots de cette fusion universelle sont toujours nouveaux, et sa source toujours inconnue et introuvable. Toujours elle inspire le respect et l'étonnement. Combien l'idée de Dieu peuplant les places solitaires, effaçant les cicatrices de nos malheurs et de nos désappointements, se lève sur l'homme affectueuse et caressante! Lorsque nous avons brisé notre Dieu traditionnel, et que nous en avons fini avec notre Dieu de rhétorique, alors Dieu peut enflammer notre cœur de sa présence1. Alors le cœur double, pour ainsi dire, et acquiert la puissance de s'élargir et de s'ouvrir de chaque côté un nouvel infini. Cette présence inspire à l'homme une infinie confiance. Il n'a pas la conviction, mais l'intuition que ce qui est le bon est aussi le vrai; qu'il peut aisément chasser avec cette pensée toutes les incertitudes particulières, toutes les craintes, et ajourner jusqu'à la révélation certaine du temps la solution des problèmes qui lui sont propres. Il est assuré que ses intérêts propres sont chers à l'être lui-même. Par la présence des lois universelles dans son esprit, il est rempli d'une siuniverselle confiance, qu'il noie dans les flots de cette confiance toutes les espérances chéries et les plus stables projets de sa condition mortelle. Il croit qu'il ne peut échapper à son bien. Les choses qui te sont destinées gravitent vers toi. Vous courez pour chercher votre

'Incontestablement cette idée est peu orthodoxe; cependant je ne pense pas qu'on puisse reprocher de pareilles pensées à Emerson. Ce fait, qu'il a été ministre unitaire, suffit à les expliquer.

ami. Laissez courir vos pieds, mais votre esprit n'a pas besoin de courir. Si vous ne le trouvez pas, n'accorderez-vous pas qu'il est bon que vous ne l'ayez pas trouvé? Car il existe un pouvoir qui est en lui aussi bien qu'en vous, qui vous aurait portés l'un vers l'autre, si cela eût été bon. Vous vous préparez avec passion à sortir et à rendre un service auquel vous invitent votre talent, votre goût, l'amour des hommes et l'espérance de la renommée. Est-ce que vous n'avez pas déjà senti que vous n'avez aucun droit à rendre ce service, si ce n'est le désir secret que vous avez d'être empêché de le rendre? Oh! crois que pendant toute ta vie, chaque mot prononcé autour de la sphère du globe qu'il est important pour toi d'entendre, vibrera à ton oreille. Chaque proverbe, chaque livre, chaque dicton qui t'est nécessaire comme aide ou consolation viendra assurément vers toi. Chaque ami après lequel soupire, non pas ta fantasque volonté, mais un grand et tendre cœur, te serrera dans ses embrassements. Et cela parce que ton cœur est le cœur de tous les hommes, parce qu'il n'y a nulle part dans la nature ni trappe, ni murailles, ni intersection, parce qu'un même sang, une infinie circulation coule à travers tous les hommes, de même que l'eau qui entoure le globe n'est qu'une mer et n'a en réalité qu'un même flux et un même reflux.

Que l'homme donc enseigne la révélation de la nature et de l'esprit; qu'il sache que le Tout-Puissant habite avec lui; que si le sentiment du devoir est dans son esprit, les sources de la nature y sont aussi. Mais s'il veut savoir ce que dit le grand Dieu, il doit, comme disait Jésus, « entrer dans sa chambre et fermer les portes.» Dieu ne se manifestera pas aux lâches. Celui qui veut connaître Dieu doit prêter l'oreille à la voix intérieure qui parle en lui et s'éloigner des asiles où retentissent les accents de la dévotion des autres hom

mes. Leurs prières mêmes lui sont nuisibles jusqu'à ce qu'il se les soit appropriées. L'âme ne se fait pas d'appel à elle-même. Notre religion se repose ordinairement sur le nombre des croyants, et dans toutes les occasions où l'appel de ce nombre est fait, aussi indirect qu'il soit, la proclamation que la religion n'est pas trouve toujours à se faire entendre. Celui qui trouve la pensée de Dieu une pensée douce et absorbante ne compte pas ses coreligionnaires. Que pourraient me dire Calvin ou Swedenborg lorsque je brûle d'un pur amour et que je repose dans une parfaite humilité?

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Il importe peu que cet appel soit fait à des multitudes ou à un seul. La foi qui repose sur l'autorité n'est pas la foi. Le degré de confiance en l'autorité mesure le déclin de la religion, l'éloignement de l'âme. La position que les hommes ont faite à Jésus après tant de siècles est une position d'autorité. Ce fait les caractérise eux-mêmes, mais ne peut altérer les faits éternels. L'âme est grande et simple. Elle ne flatte pas, n'obéit pas à la façon des adeptes, ne se fait pas de sommation à elle-même. Elle croit toujours à elle-même. Devant les immenses possibilités de l'âme, toute simple expérience, toute biographie passée aussi immaculées et saintes qu'elles soient s'évanouissent. Devant ce ciel sacré que nos pressentiments nous prophétisent, nous ne pouvons louer aisément aucune des formes de vie que nous avons vues ou dont nous avons lu les descriptions. Non-seulement nous affirmons que nous avons peu de grands hommes, mais qu'à parler d'une manière absolue nous n'en avons aucun; que nous n'avons ni histoire ni souvenir d'un caractère ou d'une manière de vivre qui nous satisfasse entièrement. Les saints et les demi-dieux que l'histoire adore, nous sommes contraints de les accepter, mais nous les acceptons avec un grain d'indulgence. Bien que dans nos heures soli

taires nous tirions de leur souvenir une nouvelle force, cependant, quand nous les examinons de près, comme le font les hommes routiniers et sans pensées, ils nous fatiguent et nous tourmentent. L'âme solitaire, originale et pure ne se donne qu'aux esprits solitaires, originaux et purs qui, à ces conditions, habitent joyeusement en elle, se conduisent par elle, parlent par elle. Alors ils sont jeunes, joyeux et agiles. Ils ne sont pas seulement sages, mais ils voient à travers toutes choses. Ils ne sont pas seulement religieux, ils sont innocents. Ils appellent la lumière leur propriété, et sentent que le gazon croît et que la pierre tombe par une loi qui leur est inférieure et qui est dépendante de leur nature. Contemple! disent-ils, je suis né au sein du grand et universel esprit. Moi l'imparfait, j'adore ce qui en moi est parfait. Je suis le sanctuaire de la grande âme, et c'est pourquoi, regardant d'en haut et dédaignant le soleil et les étoiles, je sens qu'ils ne sont que de beaux accidents et des effets qui changent et passent. De plus en plus les vagues de l'infinie nature entrent en moi, et je deviens dans mes actions et dans mes pensées public en quelque sorte et humain. Ainsi j'arrive à vivre dans mes pensées, à agir avec des énergies qui sont immortelles. Ainsi, en respectant l'âme, et en apprenant, comme disent les anciens, que sa beauté est infinie, l'homme arrivera à voir que le monde est le miracle éternel que l'âme accomplit, et s'étonnera moins des merveilles particulières; il apprendra qu'il n'y a pas d'histoire profane et que toute histoire est sacrée ; que l'univers est représenté par un atome, par un moment du temps. Il ne se composera pas plus longtemps avec des lambeaux et des haillons une vie misérable, mais il vivra avec une unité divine. Il s'écartera de tout ce qui est bas et frivole dans sa vie, et se contentera des emplois qu'il peut remplir et des ser

vices qu'il peut rendre. Il affrontera le lendemain avec calme et avec l'insouciance de cette confiance qui entraine Dieu avec elle, et il portera déjà l'avenir entier dans le fond de son cœur.

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