moire, le lire avec elle, l'examiner, l'éclaircir, le corriger peut-être, et s'assurer qu'elle l'entend parfaitement. Il surviendra souvent durant l'éducation des circonstances imprévues; souvent les choses prescrites ne tourneront pas comme on avait cru; les élémens nécessaires pour résoudre les problêmes moraux sont en trèsgrand nombre, et un seul omis rend la solution fausse. Cela demandera des conférences fréquentes, des discussions, des éclaircissemens auxquels il ne faut jamais se refuser, et qu'il faut même rendre agréables à la gouvernante par le plaisir avec lequel on s'y prêtera. C'est encore un fort bon moyen de l'étudier elle-même. Ces détails me semblent plus particulièrement la tâche de la mère. Il faut qu'elle sache le mémoire aussi bien que la gouvernante; mais il faut qu'elle le sache autrement. La gouvernante le saura par les règles, la mère le saura par les principes: car premièrement, ayaut reçu une éducation plus soignée, et ayant eu l'esprit plus exercé, elle doit être plus en état de généraliser ses idées, et d'en voir tous les rapports; et de plus prenant au succès un intérêt plus vif encore elle doit plus s'occuper des moyens d'y par venir. Troisième règle. La Bonne doit avoir un pouvoir absolu sar l'enfant. Cette règle bien entendue se réduit à celleci, que le mémoire seul doit tout gouverner: car, quand chacun se réglera scrupuleusement sur le mémoire, il s'ensuit que tout le monde agira toujours de concert, sauf ce qui pourrait être ignoré des uns ou des autres ; mais il est aisé de pourvoir à cela. Je n'ai pas perdu mon objet de vue, mais j'ai été forcé de faire un bien grand détour. Voilà déjà la difficulté levée en grande partie; car notre élève aura peu à craindre des domestiques, quand la seconde mère aura tant d'intérêt à la surveiller. Parlons à présent de ceux-ci. Il y a dans une maison nombreuse des moyens généraux pour tout faire, et sans lesquels on ne parvient jamais à rien. D'abord les mœurs, l'imposante image de la vertu devant laquelle tout fléchit, jusqu'au vice même; ensuite l'ordre la vigilance, enfin l'intérêt le dernier de tous ; j'ajouterais la vanité, mais l'état servile est trop près de la misère; la vanité n'a sa graude force que sur les gens qui ont du pain. Pour ne pas me répéter ici, permettez, monsieur le Duc, que je vous renvoie à la cinquième partie de l'Héloïse, lettre dixième. Vous y trouverez un recueil de maximes qui me paraissent fondamentales, pour donner dans une maison grande ou petite du ressort à l'autorité; du reste je conviens de la difficulté de l'exécution, parce que, de tous les ordres d'hommes imaginables, celui des valets laisse le moins de prise pour le mener où l'on veut. Mais tous les raisonnemens du monde ne feront pas qu'une chose ne soit pas ce qu'elle est, que ce qui n'y est pas s'y trouve, que des valets ne soient pas des valets. Le train d'un grand seigneur est susceptible de plus et de moins, sans cesser d'être convenable. Je pars de-là pour établir ma première maxime. 1. Réduisez votre suite au moindre nombre de gens qu'il soit possible; vous aurez moins d'ennemis, et vous en serez mieux servi. S'il y a dans votre maison un seul homme qui n'y soit pas nécessaire, il y est nuisible; soyez-ci sûr. 2. Mettez du choix dans ceux que vous garderez, et préférez de beaucoup un service exact à un service agréable. Ces gens qui applanissent tout devant leur maître, sont tous des fripons. Sur tout point de dissipa teur. 3. Soumettez-les à la règle de toute chose, même au travail, ce qu'ils feront dût-il n'être bon à rien. 4. Faites qu'ils aient un grand intérêt à rester long-temps à votre service, qu'ils s'y attachent a mesure qu'ils y restent, qu'ils craignent, par conséquent, d'autant plus d'en sortir qu'ils y sont restés plus longtemps. La raison et les moyens de cela se trouvent dans le livre indiqué. Ceci sont les données que je peux supposer, parce que, bien qu'elles demandent beaucoup de peine, enfin elles dépendent de vous. Cela posé : Quelque temps avant que de leur parler, Vous avez quelquefois des entretiens à table sur l'éducation de votre enfant, et sur ce que Vous vous proposez de faire sur les difficultés que vous aurez à vaincre, et sur la ferme résolution où vous êtes de n'épargner aucun soin pour réussir. Probablement vos gens ils n'auront pas manqué de critiquer entr'eux la manière extraordinaire d'élever l'enfant ; y auront trouvé de la bizarrerie, il la faut justifier, mais simplement et en peu de mots. Du reste, il faut montrer votre objet beaucoup plus du côté moral et pieux, que du côté philosophique. Madame la princesse en ne consultant que son cœur peut y mêler des mots charmans. M. Tissot peut ajouter quelques réflexions dignes de lui. On est si peu accoutumé de voir les grands avoir des entrailles, aimer la vertu, s'occuper de leurs enfans, que ces conversasions courtes, et bien ménagées ne peuvent manquer de produire un grand effet. Mais sur tout nulle ombre d'affectation, point de longueur. Les domestiques ont l'oeil très - perçant tout serait perdu s'ils soupçonnaient seulement qu'il y eût en cela rien de concerté; et en effet rien ne doit l'être. Bon père, bonne mère, laissez parler vos cœurs avec simplicité: ils trouveront des choses touchantes d'euxmêmes je vois d'ici vos domestiques derrière vos chaises se prosterner devant leur maître au fond de leurs cœurs voilà les dispositions qu'il faut faire naître, et dont |