finis, sans lesquels, encore une fois, les corps, tences finies ne sauraient se concevoir. Ainsi donc en résumé : les exis 1° L'espace et le temps ne sont pas des substances en dehors de Dieu ou du monde. 2o L'espace et le temps ne sont pas des attributs de Dieu. 3o L'espace et le temps ne sont pas de pures conceptions de l'esprit. L'espace et le temps sont des généralisations de l'étendue et de la durée, modes, attributs des corps, des êtres finis. Confondre l'espace et le temps avec l'immensité et l'éternité est une erreur. Confondre l'étendue et la durée avec l'espace et le temps est une autre erreur. Ce qui subsiste, c'est en Dieu l'immensité et l'éternité; c'est dans les corps l'étendue, dans les existences finies la durée. Distraire des corps l'étendue, des existences finies. la durée, n'est pas moins chimérique que distraire de Dieu l'immensité et l'éternité. CONCLUSION. Discussion de la philosophie de Leibniz. Nous serions heureux d'avoir justifié le titre même de cet ouvrage, et donné de la philosophie de Leibniz une exacte idée. A tout le moins, n'avons-nous, dans cette étude, rien négligé qui pût être de quelque conséquence. Nous avons vu naître, pour ainsi parler, la pensée du philosophe de Hanovre; nous l'avons vue s'affermir et lutter, puis d'un sublime essor s'élever, comme la pensée de Dante, jusqu'à ces vertigineux sommets où brille la lumière incréée. Effectivement, remontant jusqu'aux origines de cette grande philosophie, nous avons recherché d'abord sous quelles influences d'éducation s'était formée la pensée de Leibniz. L'éducation ne crée rien, mais elle transforme tout. La famille et les maîtres, les livres et les circonstances agissent sur l'intelligence, même à son insu, déterminent sa direction, la marquent de leur empreinte. Nous avons montré Leibniz respirant, dès sa naissance, la salubre atmosphère d'une maison d'étude et de prière. Nous avons rappelé ses dispositions précoces, cette ardeur de lecture qui chez lui ne se ralentira jamais; cette universalité d'aptitudes qui fait hésiter sur son aptitude véritable ses amis les plus clairvoyants. Nous l'avons suivi dans les Universités d'Allemagne, où il s'applique à toutes les sciences à la fois, également occupé de jurisprudence et de mathématiques, de philosophie et de théologie, attentif aux leçons de ses maîtres et aux controverses de son temps, charmé par l'antiquité et bientôt émerveillé des horizons que lui révèle ce puissant initiateur, qui s'appelle Descartes. Cette forte culture, et, en même temps que cette prodigieuse dispersion de l'esprit, l'hésitation qui s'en doit suivre, se manifestent à chaque ligne dans ses premiers écrits. Nous ne les en avons pas moins analysés avec étendue, et contrôlés par l'examen de sa correspondance à la même époque. Ce sont là les débuts de Leibniz. Incertaine et flottante, quoiqu'on puisse déjà, à travers ses incertitudes mêmes, pressentir ce qu'elle sera un jour, c'est en France, en plein Cartésianisme, que cette pensée se fixe et que Leibniz arrête ses principes. Ce n'est pas tout. Il n'affirme ses principes que lorsqu'il s'en croit assuré. Il les éprouve donc, si l'on peut parler ainsi, il les trempe dans le courant des âges, et, sondant avec une sagacité hardie les profon deurs les plus obscures de l'histoire de l'esprit humain, il met autant de soin à découvrir des antécédents à ses théories que d'autres à les dissimuler. Ainsi la philosophie de Leibniz n'est pas sortie de son cerveau, comme Minerve toute armée du cerveau de Jupiter. Fille de son génie, elle est fille du temps et de la tradition. Constituée de la sorte, arrivée lentement et par degrés à cette complète organisation d'elle-même, cette philosophie nous est apparue comme critique tout ensemble et comme dogmatique. Nous l'avons successivement envisagée sous ce double aspect. En premier lieu, nous avons exposé sans omission. et apprecié sans réticence la longue et intéressante polémique que Leibniz institua contre ses trois illustres contemporains, Descartes, Spinoza, Locke: polémique toute d'abstractions et où cependant abondent les applications les plus importantes; où la physique et la métaphysique, la géométrie et la morale deviennent tour à tour le sujet de hautes controverses; où l'amour de la gloire humaine peut bien altérer par moments, mais non pas abolir l'amour de l'éternelle vérité. En second lieu, nous avons étudié la doctrine de Leibniz. Cette doctrine nous a offert comme une trilogie grandiose. La monadologie, la loi de la continuité, l'harmonie préétablie, la résument tout entière. Nous avons tenté, au milieu de leurs délicatesses, comme aussi de leurs subtilités et de leurs contradictions, de mettre en lumière ces trois théories, d'en marquer la connexion, plus ingénieuse, malgré tout, que solide, plus artificielle que naturelle. La monadologie, la loi de la continuité, l'harmonie préétablie ne sont d'ailleurs que les supports, la base de la doctrine de Leibniz. C'est dans la connaissance de Dieu qu'il en faut chercher le couronnement. Comment savons-nous que Dieu est, et quels sont ses attributs? De quelle manière concilier ces attributs entre eux et ces attributs avec l'existence du monde envahi par le mal? Quelle est enfin la destinée de l'homme et quelle idée concevoir de la vie définitive qui lui est réservée? Tous ces ardus problèmes où l'infini se trouve soumis en quelque façon à la pesée du fini, où d'ordinaire le supreme effort de la raison consiste à comprendre qu'elle ne comprend plus et qu'elle ne peut plus comprendre; toutes ces formidables questions dont le charme nous attire et dont le mystère nous accable, ont été réunies et traitées par Leibniz sous le beau nom de Théodicée, ou De la justice de Dieu. Mais si le nom est nouveau, la chose est fort ancienne, aussi ancienne que la réflexion humaine. De tout temps, les plus sublimes esprits en ont fait le but de leurs recherches et l'objet de leurs méditations. C'est pourquoi, après avoir attentivement exploré toutes les parties de la Théodicée, nous avons dû comparer les solutions que Leibniz y propose avec les enseignements de Platon, d'Aristote, des Alexandrins dans l'antiquité; de saint Anselme et de saint Thomas au moyen âge; de Descartes, de Malebranche, de Samuel Clarke dans les temps modernes. Cette comparaison était nécessaire pour déterminer avec le mérite relatif de la doctrine de Leibniz sa valeur absolue. Nous voudrions maintenant porter un jugement d'ensemble sur cette doctrine et sur la polémique qui l'a préparée; signaler les parties caduques de cette philososophie dogmatique et critique; en indiquer les parties impérissables. Certes la tâche est difficile et peut sembler téméraire. Quel nom en effet que celui de Leibniz, et quel monument que sa philosophie! Et cependant, que serait une étude de cette philosophie, qui n'aboutirait pas à de telles conclusions? Qui ne sait, en outre, que c'est dans des balances de cuivre que se pèsent et l'or et le diamant? Essayons donc, sans engouement, mais non pas sans |