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grès ultérieurs de la vraie philosophie de l'esprit humain'.

Cependant, Des Maizeaux, plusieurs années après la mort de Leibniz, n'hésitait pas à dire dans la préface de son Recueil, « qu'il ne voyait pas encore que la philosophie de Leibniz eût fait fortune. »

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Ce dédain de Des Maizeaux nous doit paraître singulier.

La France du dix-huitième siècle ne le partagea pas du moins tout entière. Voltaire, il est vrai, appelle Leibniz « le Gascon de l'Allemagne, » et sa verve frivole s'égaye tristement à railler dans Candide les nobles assertions de l'optimisme. Mais Rousseau relève cette consolante doctrine et emploie à l'accréditer la dialectique, les flammes, la musique de son langage. Mais Diderot, parlant du philosophe de Hanovre, déclare : « que cet homme fait à lui seul à l'Allemagne autant d'honneur que Platon, Aristote et Archimède en font ensemble à la Grèce. » Le Chevalier de Jaucourt écrit une Vie de Leibniz, qui restera. Et lorsque, longtemps après que Fontenelle avait célébré devant l'Académie des sciences de Paris Leibniz et ses travaux, l'Académie de Berlin songea à proposer pour sujet de prix l'éloge de celui qui avait été son premier président, ce fut un Académicien français, l'immortel Bailly, qu'elle couronna 3.

1. Cf. M. de Biran, OEuvres philosophiques, t. IV, p. 360, Doctrine philosophique de Leibniz.

2. Recueil de pieces sur la philosophie, la religion, l'histoire, les mathématiques, par Leibniz, Clarke, Newton. Amsterdam, 1720, 2 vol. in-18.

3. OEuvres complètes, p. 4674, Lettre à d'Alembert, 23 décembre 1768. 4. OEuvres, t. VI, p. 239 et suiv. (an vIII).

5. Cet éloge fut publié avec plusieurs autres en un vol. in-8. Paris,

1770.

Avec une connaissance plus complète des écrits de Leibniz, notre âge a ressenti aussi une admiration plus profonde pour le génie sublime qui en est l'au

teur.

C'est à M. de Biran que revient l'honneur d'avoir, pour la première fois, en France, depuis près d'un siècle fait reparaître avec éclat dans la philosophie «< un nom qui ne semblait plus appartenir qu'aux sciences mathématiques.

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D'un autre côté, le crédit que M. de Biran rendait à Leibniz par la force de ses méditations, M. Royer-Collard le consacrait par l'autorité de son témoignage. « Ce qui distingue la philosophie de Leibniz de toutes les autres, écrivait M. Royer-Collard, c'est l'originalité, la hauteur et l'étendue. Leibniz a étonné les plus grands hommes du plus grand siècle qui ait lui sur la terre; ses erreurs sont comptées parmi les titres de l'esprit humain; et le degré d'admiration qu'excitera ce vaste génie sera toujours la mesure de l'intelligence de ses lecteurs1. »

Enfin M. Cousin, grâce à l'éloquence de son enseignement, achevait de reconquérir au nom de Leibniz un rang mérité.

Leibniz, écrivait M. Cousin, Leibniz est un maître que les plus indépendants peuvent avouer. Placé au faîte de la révolution cartésienne, Leibniz domine et résume tout le passé, dont il possédait une connaissance et une intelligence profondes. C'est l'incarnation la plus complète qui ait encore paru sur la terre du génie de la spéculation et du génie de l'histoire. »

1. Fragments Historiques, à la suite des œuvres de Reid, t. III, p. 398.

2. De la Métaphysique d'Aristote. Paris, 1838, in-8, p. 115.

A la suite de ces illustres penseurs, et pour notre faible part, nous voudrions contribuer à divulguer cette grande philosophie de Leibniz, qui honore l'esprit humain et dont la France peut se glorifier, parce qu'elle n'est qu'une dérivation puissante du Cartésianisme. On l'a dit avec raison : « Leibniz est le dernier et le plus grand des Cartésiens'. » Il clôt le dix-sep→ · tième siècle, où il faut toujours revenir. Car là sont les sources vives où doit se retremper la raison.

1. M. Cousin, Fragments de philosophie Cartésienne, Avant-propos, p. XI.

FIN.

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