on jamais l'indiquer, si l'on ne convient que c'est celui qu'ils commirent, lorsque par des clameurs sacriléges, ils demanderent la mort de Jésus, et qu'ils prononcèrent contre eux-mêmes et contre leur postérité, cette effroyable imprécation: Que son sang retombe sur nous, et sur nos enfants (235). Cependant ce peuple infortuné subsiste toujours, malgré de si longs malheurs; et le doigt de Dieu est encore ici (236). Les Juifs continuant de subsister dans leur dispersion, et se perpétuant, sans se mêler à aucun des peuples au milieu desquels la vengeance divine les a jetés, donnent à l'univers un spectacle inouï; et on ne peut trouver la raison d'un fait si surprenant, que dans la profondeur des conseils de Dieu: or, voici ce qu'il lui a plu de nous faire connaître de ses desseins ultérieurs sur le peuple qu'il a appelé son premier-né (237). « Comme les Juifs doivent revenir un jour à ce Messie qu'ils ont méconnu, et que le Dieu d'Abraham n'a pas encore épuisé ses miséricordes sur la race quoique infidèle de ce patriarche; il a trouvé un moyen, dont il n'y a dans le monde que ce seul exemple, de les conserver hors de leur pays et dans leur ruine plus longtemps même que les peuples qui les ont vaincus, On ne voit plus aucun reste ni des anciens Assyriens, ni des anciens Mèdes, nides anciens Perses, ni des anciens Grecs, ni même des anciens Romains; la trace s'en est perdue, et ils se sont confondus avec d'autres peuples. Les Juifs qui ont été la proie de ces anciennes nations si célèbres dans les histoires, leur ont survécu; et Dieu, en les conservant, nous tient en attente de ce qu'il veut faire encore des malheureux restes d'un peuple autrefois si favorisé. Cependant leur endurcissement sert au salut des gentils, et leur donne cet avantage inestimable, de trouver en des mains non suspectes les Ecritures, qui ont prédit Jésus-Christ et ses mystères. Nous voyons entre autre choses dans ces Ecritures et l'aveuglement et les malheurs des Juifs, qui les conservent si soigneusement. Ainsi nous profitons de leur disgrace: leur infidélité fait un des fondements de notre foi: ils nous apprennent à craindre Dieu, et nous sont un spectacle éternel des jugements qu'il exerce sur ses enfants ingrats; afin que nous apprenions à ne nous point glorifier des grâces faites à nos pères. * Un mystère si merveilleux, et si utile à l'instruction du genre humain, mérite bien d'être considéré : mais nous n'avons pas besoin des discours humains pour l'entendre: le Saint-Esprit a pris soin de nous P'explicerar bouche de saint Paul (238), Après avoir parlé du petit nombre des Juits qui avaient reçu l'Evangile, et de l'aveuglement des autres, il (cet Apôtre) entre dans une profonde considération de ce que doit devenir un peuple honoré de tant de (235) Matth, xxVII, 25. (236) Exod. vII, 19. (257) Exod. iv, 22. OEUVRES COMPL. DE LA LUZERNE. I, grâces; et nous découvre tout ensemble, le profit que nous tirons de leur chûte, et les fruits que produira un jour leur conversion, .... il nous fait donc voir clairement, qu'après la conversion des gentils, le Sauveur que Sion avait méconnu et que les enfants de Jacob avaient rejeté, se tournera vers eux, effacera leurs péchés et leur rendra l'intelligence des prophéties qu'ils auront perdue durant un long temps, pour passer successivement, et de mainen main, dans toute la postérité, et n'être plus oubliée. Ainsi les Juifs reviendront un jour, et ils reviendront pour ne s'égarerjamais: mais ils ne reviendront qu'après que l'Orient, et l'Occident, c'est-à-dire, tout l'univers, aura été rempli de la crainte et de la connaissance de Dieu.... << Voilà ce que dit saint Paul sur l'élection des Juifs, sur leur chûte, sur leur retour, et enfin sur la conversion des gentils qui sont appelés pour tenir leur place, et pour les ramener à la fin des siècles à la bénédiction promise à leurs pères, c'est-à-dire, au Christ qu'ils ont renié. Ce grand Apôtre nous fait voir la grâce qui passe de peuple en peuple pour tenir tous les peuples dans la crainte de la perdre; et nous en montre la force invincible, en ce qu'après avoir converti les idolâtres, elle se réserve pour dernier ouvrage. de convaincre l'endurcissement et la perfidie judaïques. « Par ce profond conseil de Dieu, les Juifs subsistent encore au milieu des nations, où ils sont dispersés et captifs: mais ils y subsistent avec le caractère de leur réprobation (239). parce qu'ils n'ont pas reçu le Christ promis à leurs pères, « Ils l'attendent néanmoins encore; ct leur attente toujours frustrée fait une partie de leur supplice: ils l'attendent, et font voir en l'attendant, qu'il a toujours été attendu. Condamnés par leurs propres livres, ils assurent la vérité de la religion; ils en portent pour ainsi dire, toute la suite écrite sur leur front; d'un seul regard, on voit ce qu'ils ont été, pourquoi ils sont comme on les voit, et à quoi ils sont réservés (240). « Enfin cette suite même de notre sainte Religion, « continuée sans interruption et sans altération durant tant de siècles, et malgré tant d'obstacles survenus, fait voir manifestement que la main de Dieu la soutient. « Qu'y a-t-il en effet de plus merveilleux, que de voir toujours subsister sur les mêmes fondements dès le commencement du monde, sans que ni l'idolatrie et l'impiété qui l'environnaient de toutes parts, ni les tyrans qui l'ont persécutée, ni les hérétiques et les infidèles qui ont tâché de la corrompre, ni les lâches qui l'ont trahie, ni ses sectateurs indignes qui l'ont déshonorée par leurs crimes, ni enfin la longueur du temps qui seule suflit pour abattre toutes les choses humai nes, aient jamais été capables, je ne dis pas de l'éteindre, mais de l'altérer (241)? >>> de C'est ainsi que les prophéties qui ont annoncé Jésus-Christ, et leur accomplissement dans sa personne, la vie de ce Dieu sauveur, ses miracles, sa doctrine, sa pas sion, sa mort, sa résurrection, la promptitude avec laquelle la religion s'est propagée, les instruments qu'il a employés pour l'établir et l'étendre; la constance des martyrs qui l'ont scellée de leur sang; la désolation e la Judée, la dispersion des Juifs, la conservation de ce peuple malheureux, l'ancienneté enfin et la perpétuité de notre sainte religion, sont autant de moyens qui concourent à prouver d'une manière victorieuse, sa vérité et sa divinité; et il est impossible d'envisager toutes ces preuves ramassées ensemble, sans en ressentir la force, à laquelle nul homme raisonnable ne peut résister. Qu'on juge après cela s'il est possible de douter que la religion dont Jésus-Christ est l'auteur, soit la seule véritable, et si jamais aucune autre a rien eu qui en approchat: mais que l'on juge aussi quel nom méritent ceux qui méconnaissent eux-mêmes, et voudraient faire méconnaître aux autres, cet ineffable don de Dieu; et s'il est vrai comme ils l'affichent, que le sentiment qui les anime, est l'amour de Dieu et l'amour de leurs semblables. Les chefs de ces nouveaux sectaires imitent ces hommes dont parle saint Augustin, qui tâchaient de persuader aux autres de Dien vivre, et de n'être pas chrétiens: Quærunt ergo plerumque tales homines etiam persuadere hominibus ut bene vivant, et christiani non sint (242). Ils marchent sur Jes traces de certains philosophes dont parle le même Père, qui traitaient d'une manière subtile, des vertus et des vices, débitaient à pleine bouche leur propre sagesse, et osaient dire aux hommes: Suivez-nous, embrassez notre secte, si vous voulez vivre heureux : Fuerunt ergo quidam philosophi de virtutibus et vitiis subtilia multa tractantes... suam sapientiam buccis crepantibus ventilantes, qui etiam dicere auderent hominibus: Nos sequimini, sectam nostram tenete, si vultis beate vivere (243). Mais quel jugement le grand évêque d'Hippone portait-il de ces prétendus docteurs ? Il les regardait comme des voleurs et des larrons qui n'entrant point par la porte, ne voulaieni que perdre, qu'égorger, que tuer: Sed non intrabant per ostium: perdere volebant, mactare, et occidere (244). Par là même il a jugé les théophilanthropes de nos jours; il les a démasqués, il a démontré toute la fausseté du titre qu'ils s'attribuent. Est-ce aimer les (241) BOSSUET, loc. cit. n. 1. (242) S. AUG., Tract. 45 in Joan. (243) Ibid. (244) Ibid. hommes, que de les perdre? Est-ce aimer Dieu que de perdre les hommes? Que ces nouveaux sectaires se vantent tant qu'ils voudront de bien vivre: sans examiner si ce témoignage qu'ils se rendent eux-mêmes, est conforme à la vérité, nous disons d'eux ce que saint Augustin disait des païens qui tenaient le même langage: dès qu'ils n'entrent point par la porte, quel avantage pourront-ils retirer de ce dont ils se glorifient? Dicant ergo pagani: bene vivimus. Si per ostium non int intrant, quid prodest unde gloriantur (245)? Car de quoi sert-il de bien vivre, à qui n'obtient pas de toujours vivre? Nam cui non datur semper vivere, quid prodest bene vivere? (246) Or, personne ne peut avoir l'espérance certaine et véritable de toujours vivre, s'il ne reconnaît la vie qui est Jésus-Christ, et s'il n'entre parla porte, dans le bercail: Non est autem cui. quam spes vera et certa semper vivendi, nisi agnoscat vitam, quod est Christus, et per januam intret in ovile (247). Les chefs de cette nouvelle secte enseiguent à leurs disciples, qu'après cette vie passagère, il en est une autre qui n'aura point de terme, et font profession d'attendre cette vie future et éternelle. Mais s'ils meurent dans l'incrédulité, quel sera leur sort durant cette vie qui ne doit jamais finir? Et comment le petit nombre de vérités qu'ils admettent ne leur fait-il pas ouvrir les yeux sur les dangers auxquels ils s'exposent, en refusant eux-mêmes de croire, en détournant les autres de croire les dogmes qu'ils osent rejeter? Dès qu'on reconnaît qu'il existe un Dieu, et que l'âme est immortelle, il est impossible de ne pas convenir qu'aussitôt après qu'elle se sera séparée de son corps, l'âme retournera à Dieu qui l'a créée (248). Mais le Créateur qui la rappellera à lui, ne la jugera-t-il pas selon sa justice, comme il l'a tirée du néant par sa puissance? L'Apôtre des nations as sure que ce redoutable jugement aura lieu: « Il est arrêté que les hommes meurent une fois; et leur mort sera suivie du jugement. (249). Et la raison seule démontre que Dieu se doit à lui-même d'exercer cet acte de sa justice. Serait-il infiniment parfait, seraitil Dieu, s'il pouvait demeurer indifférent à l'usage que des créatures raisonnables auraient fait de ses dons? Mais quelle sera la règle de ce jugement divin? Le même apotre assure que la règle de ce jugement sera l'Evangile. « Dieu jugera par Jésus-Christ, selon l'Evangile que je prèche, ce qu'il ya de caché dans le cœur des hommes.. (250). Et Jésus-Christ a dit dans l'Evangile: « Celui qui ne croira point sera condamné (251). O vous, qui ébranlés déjà, et sur le point d'être séduits par des suggestions perlides, par l'amour de la nouveauté, par l'intérêt des passions fougueuses qui vous pressent de les délivrer de tout frein, et de les laisser s'assouvir en liberté, par le dégoût enfin de la saine doctrine, et la démangeaison d'entendre ce qui vous flatte, pensez à vous choisir des maîtres qui vous instruisent selon vos désirs déréglés (252); avant de faire une démarche qui peut avoir pour vous des suites si terribles, avant de renoncer à la religion de vos pères, attendez du moins que ceux qui vous en prêchent une nouvelle, vous démontrent, mais d'une manière à ne vous laisser aucun doute, mais de manière à vous établir dans une parfaite sécurité que le Dieu qui a créé votre âme immortelle ne la jugera point; ou que s'il la juge, il ne la jugera point, quoiqu'elle ait refusé d'obéir à l'Evangile. (215) Ibid. (246) Ibid. (247) Ibid. (248) Eccle. xII, 7. (249) Hebr. 1x, 27. (250) Luc. xviii, 34. (251) Marc. XVI, 16. , Ou plutôt puisqu'il ne sera jamais possible de rien avancer de solide à l'appui de ces fatales erreurs; Fermez l'oreille aux discours profanes et vains de ces hommes dont la parole gagne comme la gangrène; qui se sont égarés eux-mêmes du chemin de la vérité; et ont réussi à renverser la foi de quelques-uns (253). Malheur à ceux qui ont embrassé leur criminel parti, et qui se sont mis au rang de leurs disciples ! «lis apprendront toujours, et ne parviendront jamais à la connaissance de la vérité (254). » Malheur à ces faux docteurs ! « Comme Jannès et Mambrès résistèrent autrefois à Moïse, ceux-là de même résistent à la vérité; ils sont corrompus dans l'esprit et pervertis dans la foi. Mais le moment viendra où leur folie sera connue de tout le monde, comme le fut alors celle de ces deux imposteurs (255). Quant à vous, demeurez fermes dans les choses que vous avez apprises, sachant de qui vous les tenez (256). N'oubliez jamais que par le bienfait inestimable de votre vocation, vous êtes de la cité des saints, et de la maison de Dieu : que vous étes édifiés sur le fondement des apôtres et des prophètes; Jésus-Christ étant lui-même la principale pierre de l'angle; que tout l'édifice posé sur cette pierre sélève et s'accroît avec une juste symétrie, pour étre un saint temple consacré au Seigneur; et que vous-mêmes vous entrez dans la structure de cet édifice, pour étre la maison de Dieu par le Saint-Esprit (257). » Ne vous exposez point à perdre de si précieux avantages. Laissez les hommes dépourvus de sens chercher à se fixer dans (252) 11 Tim. iv, 3, (257) Ephes. 11, 19, 22. (259) Matth. v, 25. (260) Prospectus de la secte des hommes sans Dieu. Quand on y est admis, on prend (en mettant la main sur le livre destiné à enregistrer les actions de vertu) l'engagement d'employer tous les moyens, excepté celui de la violence, pour déraciner l'erreur fatale de l'existence d'un Dieu. des maisons bâties sur le sable, et dont la ruine est inévitable (258). Vous, demeurez irrévocablement dans la structure de la maison fondée sur la pierre. Maintenant, il est vrai, la pluie tombe, les les fleuves débordés roulent leurs eaux contre cette maison sainte; les vents sont déchaînés contre elle; mais déjà plusieurs fois elle a essuyé de semblables orages, et ils ne l'ont point fait tomber: if en sera de même de celui-ci il ne la renversera point, parce qu'elle est fondée sur la pierre (259). Ne vous laissez done point troubler, ne vous laissez point séduire par les scandales dont vous êtes les témoins: livrez-vous au contraire aux justes sentiments d'horreur que doivent vous inspirer de si énormes excès. Il en est un surtout, dont jusqu'à nos jours les annales du monde n'avaient point fourni d'exemple, et qu'il était réservé à notre siècle d'enfanter. Qui jamais avait ouï dire qu'on eût formé la monstrueuse entreprise d'établir une association d'hommes sans Dieu; d'établir une association dont on ne pourrait devenir membre, qu'en prenant d'une manière expresse et solennelle, l'engagement d'employer tous les moyens, excepté celui de la violence, pour déraciner l'erreur fatale de l'existence d'un Dieu (260) ? Parmi les ouvrages des anciens auteurs qui ont écrit au milieu des ténèbres du paganisme, on en trouve où l'existence de Dieu est reconnue et enseignée, comme la vérité tout à la fois la plus incontestable et la plus utile. L'un dit : « Antérieurement à tout enseignement, nous sommes tous persuadés qu'il existe une divinité vers laquelle nous devons tourner nos regards, à laquelle nous devons recourir; et il me semble que nos ames sont par rapport à Dieu, ce que sont les organes de la vue par rapport à la lumière (261). >>> L'autre croit « plus facile de bâtir une ville sans terrain, que de réunir solidement une cité, si on bannit entièrementla croyance de la Divinité (262). » Celui-ci observe que si « les anciens philosophes ont eu sur la nature de Dieu des opinions diverses, et qui ne s'accordaient pas entre elles; guidés par la nature, ils reconnaissent l'existence de Dieu (263). » Celui-là ne craint point d'assurer qu'il n'y a < nulle part de nation assez étrangère à toute loi, à toute moralité, pour ne pas croire qu'il existe quelque divinité (264). » (261) JULIAN. Epist. ad Heracl.: Omnes ante doctrinam numen esse aliquod persuasi sumus: eo respiciendum, ad eum properandum: credoque sic animos nostros se habere ad Deum, ut visu prædita ad lucem. › (262) PLUTARCH., contra Coloten. Epic: Facilius urbem condi sine solo posse puto, quam opinione de diis penitus sublata civitatem coire aut constare. > (263) CICER. 1, De Nat. deor.: Sententiæ veterum philosophorum de natura Dei fuerunt variæ, et inter se dissidentes... Natura duce intelligebaut Deum esse., (261) SENEC., De benef.: Nec ulla gens usquam Tel a été le langage de ces philosophes païens avant la chute des idoles; et dixhuit cents ans après la prédication de l'Evangile, des hommes nés dans le sein du christianisme entreprennent de former une association dont on ne pourra devenir membre, sans prendre d'une manière expresse et solennelle, l'engagement d'employer tous les moyens, excepté celui de la violence, pour déraciner l'erreur fatale de l'existence d'un Dieu! O cieux, frémissez d'étonnement, obstupescite, cæli (265) 1 Pendant que vous publiez la gloire du Créateur, et que vous annoncez sa puissance, jusqu'aux extrémités du monde (266), de faibles mortels se liguent et forment un complot, pour faire méconnaître l'existence de celui qui leur a donné l'être ! mais vous continuez de rendre à ce grand Dieu un éclatant témoignage; et les torrents de lumière que vous répandez jusques sur la tête de ces obscurs blasphémateurs, dissipent sans peine tous les nuages qu'ils cherchent en vain à répandre, pour tâcher d'obscurcir l'éternelle vérité dont vous ne cessez d'instruire les habitants de l'univers. Nous venons de mettre sous vos yeux, nos très-chers frères, le triste tableau des atteintes portées à notre sainte religion, par les différents ennemis qui ont conjuré contre elle; et vous voyez jusqu'où ceux qui ne se proposent rien moins que de la détruire, ont poussé l'exécution deleur projet insensé. Ces désastres dont vous avez été et vous continuez encore d'être les témoins, vous pénètrent sans doute d'une vive douleur; et votre âme est désolée, comme le fut autrefois celle du prophète, lorsque lisant dans l'avenir, dont Dieu daignait lui révéler le secret, les malheurs qui allaient bientôt fondre sur Jérusalem, il s'écriait: Mon cœur est tout languissant au dedans de moi... la plaie profonde de la fille de mon peuple m'a blessé profondément: j'en suis attristé : j'en suis accablé (267). Mais il ne vous suflirait pas de ressentir une affliction stérile. Vous devez chacun dans votre état et selon votre pouvoir, vous opposer au progrès d'un si grand mal, et travailler à le réparer. Afin d'accomplir ce devoir indispensable, ayez soin d'abord de vous préserver vous-mêmes de la contagion; de vous affermir de plus en plus vous-mêmes, dans un attachement inviolable à la vérité et à l'unité. Ayez cans le cœur et sur les lèvres ces admirables paroles du grand évêque de Barcelonne saint Pacien: Chrétien est mon nom; catholique est mon surnom (268). est adeo extra leges moresque projecta, ut non ali quos deos credat. › (265) Jerem. 11, 12. (266) Psal. xvIII, 1. 4. , (268) S. PACIAN. Ep. Barcinon. Ep. 1 ad Sempron. Novatian, quæ est de catholico nomine: Christianus mihi nomen est: Catholicus vero cogno men.. (269) Matth. xx, 10. Si les apôtres de l'incrédulité viennent vous dire: Venez avec nous: embrassez notre parti: que chacun de vous soit prêt à leur répondre : e: Chrétien est mon nom, JésusChrist est mon unique maître (269), et son Evangile est ma loi. J'adore ce Dieu sauveur qui a porté mes péchés en son corps sur la croix, afin qu'étant mort aux péchés, je vive pour la justice (270). Je vous plains, si Jésus crucifié est pour vous un scandale ou une folie: la parole de la croix n'est une folie que pour ceux qui se perdent. La parole de la croix est pour moi l'instrument de la puissance de Dieu; Jésus crucifié est pour moi la force de Dieu, la sagesse de Dieu (271). Vous vous croyez doués d'une haute sagesse, 'parce que vous rejetez tout ce qui a été prêché: mais cette prétendue sagesse est une véritable folie (272) : c'est d'elle que Dieu a dit: Je détruirai la sagesse des sages, et je réprouverai la science des savants (273). Je puis n'étre à vos yeux qu'un insensé, parce que je ne m'élève point contre la science de Dieu, et que je ne rougis point de l'Evangile (274). Mais vos mépris font ma gloire; et méprisant moi-même à plus juste titre la sagesse de la chair qui est ennemie de Dieu (275), je m'attache inséparablement à la folie de la prédication, par laquelle il a plu à Dieu de sauver ceux qui croient en lui (276). Si les apôtres du schisme viennent vous dire: Venez avec nous; que chacun de vous soit prêt à leur répondre: Catholique est mon surnom. Je suis membre de cette société ancienne que Jésus-Clirist... a... fondée sur la pierre, et où saint Pierre el ses successeurs doivent présider par ses ordres; de cette société qui se justifie ellemême par sa propre suite, et porte dans son éternelle durée le caractère de la main de Dieu; qui de Pie VI, qui remplit aujourd'hui si dignement le premier siége de l'Eglise, remonte sans interruption jusqu'a saint Pierre, établi par Jésus-Christ prince des apôtres. Je suis membre de l'Eglise catholique, qui seule remplit tous les siècles précédents par une suite qui ne peut lui ètre contestée (277). Cette ancienneté, cette suite, cette succession, cette origine, ne se trouvent point chez vous. Vos prétendus pasteurs commencent par eux-mêmes, ils ne succèdent à personne, ils n'ont point de prédécesseurs, ils ne viennent point de la source. Le caractère de votre nouveauté est ineffaçable; et comment pourrais-je m'unic à vous, puisque j'ai vu le jour où vous n'étiez pas encore? Mais que vos œuvres, nos très-chers frères, soient conformes à votre foi; que votre conduite s'accorde avec cette profession d'un attachement inviolable à la vérité et à l'unité. Environnés d'incrédules et de schismatiques, soyez purs et sans taches comme des enfants de Dieu au milieu d'une nation dépravée et corrompue, et brillez à leurs yeux comme des astres dans le monde 1(278). A ce débordement de mœurs, à ce déluge de crimes qui souillent la terre où vous vivez, opposez l'innocence de votre vie et la sainteté de vos exemples, afin que VOS adversaires rougissent, n'ayant aucun mal à dire de vous (279). Car telle est la volonté de Dieu, qu'en faisant le bien vous fermiez la bouche aux hommes ignorants et insensés (280). Livrez-vous à la pratique des bonnes œuvres, que le malheur des temps rend si nécessaires; que la charité fraternelle demeure en vous; ne négligez point d'exercer l'hospitalité; souvenez-vous de ceux qui sont dans les chaînes, comme si vous étiez vousmêmes enchaînés avec eux (281), et sachez apprécier les services que vous rendent ceux qui travaillent parmi vous, qui vous gouvernent selon le Seigneur, et vous avertissent de vos devoirs; regardez-les comme les dignes objets de votre charité, à cause du travail qu'ils font, pour vous procurer les secours spirituels dans des temps si difficiles (282). Cependant ne croyez pas qu'il vous suffise, pour assurer votre salut, d'être vertueux vous-mêmes; ne pensez point que vous aurez rempli toute justice, par cela seul que votre propre conduite sera bien réglée; ce serait donner dans une erreur grossière (283) et vous faire une dangereuse illusion. Dieu a commandé à chacun des hommes de prendre soin de son prochain (284), et ce soin doit avoir particulièrement pour objet ceux avec qui la divine Providence nous a donné des rapports immédiats, c'est pourquoi l'apôtre saint Paul enseigne que « si quelqu'un n'a pas soin des siens, et spécialement de ceux de sa maison, il a renoncé à la foi et est pire qu'un infidèle (285). Mais pour ne point tomber dans cette espèce d'apostasie, ce n'est pas assez de pourvoir aux besoins corporels des siens; il est surtout nécessaire de pourvoir aux besoins de leur âme (286). Ayez donc la plus grande vigilance sur tous ceux qui vous appartiennent; ayez pour eux la plus tendre sollicitude; n'épargnez rien pour préserver de toute corruption leur esprit et leur cœur; et si quelques-uns déjà avaient eule malheurde donner dans l'égarement, mettez tout en euvre pour les faire rentrer dans le chemin de la vérité. Pères et mères, entendez ceci, audite hæc patres, et appliquez-vous plus que jamais à élever vos enfants en les instruisant et les reprenant selon le Seigneur. Vos enfants sont un grand dépôt que Dieu vous a confié, et dont il vous demandera un compte rigoureux, que rien ne vous coûte pour conserver un dépôt si précieux, et empêcher que le voleur ne vous le ravisse. Vous pouvez acquérir un grand mérite devant Dieu en accoutumant de bonne heure les enfants qu'il vous a donnés à combattre sous ses lois, en les lui dédiant, les lui consacrant dès le berceau. De magnifiques récompenses vous attendent, si vous êtes fidèles à poser ces fondements d'une éducation religieuse; mais à quels châtiments ne vous exposerait pas la négligence à vous acquitter d'une obligation si sacrée (287) 1 Considérez combien le malheur même des temps rendrait cette négligence plus criminelle. Que vous avez été bien plus favorisés dans les jours de votre jeunesse! La religion s'est présentée à vous revêtue de tout son éclat; de pieux monuments s'offraient partout à vos regards, et vous rappelaient les mystères sublimes de la foi; la décoration du sanctuaire et la pompe de ses cérémonies vous annonçaient la grandeur infinie du Dieu qui y recevait les hommages de ses créatures: les sources de la sainte doctrine étaient ouvertes de toutes parts; elles coulaient en abondance; qu'il vous était facile d'y puiser la connaissance de la vérité et l'amour de la vertul Vos enfants sont privés de tous ces avantages. Les signes de la piété ont été proserits et anéantis; ce qui reste des sanctuaires du Seigneur n'offre plus que de tristes débris qui en attestent la spoliation et le pillage. Que de temoles il faut fuir, de peur de participer à un culte sacrilége! Que la parole du Seigneur est devenue rare! Les moyens, de séduction semblent se multiplier à proportion que les ressources pour s'en garantir disparaissent. Quelles écoles a-t-on ouvertes à la jeunesse, et que se passe-t-il dans la plupart des établissements destinés à son instruction? La vérité en est bannie. On met tout en œuvre pour y introduire des pratiques anti-chrétiennes et l'enseignement de l'erreur, ou pour forcer du moins à y laisser les malheureux élèves dans l'ignorance absolue de ce qu'il leur importe le plus de connaitre, mæ, corporisque significat: et hæc enim cura est. › (287) S. JOAN. CHRYSOST., homil 9 in Epist. I ad Timoth.: Neque enim parvi meriti est indultos nobis a Deo liberos, ad ipsius exercere militiam, eique ab ipsis infantiæ pannis dedicare. Nam si ejusce educationis fundamenta jecerint, maximis alliciendi sunt præmiis; quemadmodum si neglexerint, gravissimis cruciatibus... Audite hæc, patres, vestrosque tilios in disciplina, et correptione Domini erudite summa cum diligentia... magnum habemus pretiosumque depositum filios, ingenti illos servemus cura, atque omnia faciamus, ne fur id nebis astutus auferat. |