envers leurs commettants, de l'intégrité de ce scellé, et ils devaient être punis sévèrement, non seulement dans le cas où ils l'auraient brisé eux-mêmes, mais encore dans celui où ils l'auraient laissé briser par d'autres. Quel châtiment leur a-t-on infligé? LXXI. On combat aussi la narration de saint Matthieu sur l'argent donné aux gardes, pour les engager à publier l'enlèvement du corps de Jésus-Christ. & Il n'est pas probable que les princes des prêtres et tout le sanhédrin, s'ils ont été convaincus du miracle de la résurrection, n'en aient été touchés; qu'ils aient été assez dépravés pour résister à une vérité qui leur aurait été aussi clairement prouvée. << En supposant tout le grand conseil assez méchant pour agir ainsi contre sa conscience, il n'est pas croyable qu'il fût assez sot, pour engager, à prix d'argent, la garde à un silence qu'on devait être sûr qu'elle n'observerait pas. << On ne peut pas imaginer non plus, que les soldats si effrayés, dit-on, de l'apparition d'un ange, aient consenti à accepter de l'argent pour débiter un mensonge. S'ils avaient effectivenient vu un ange avec un aspect terrible, ils auraient dû le craindre bien plus que le sanhédrin, et espérer de leur fidélité une récompense au-dessus de l'argent qu'on leur offrait. « Voilà donc ce qui sera probablement arrivé. Les disciples seront venus dans la nuit, et auront effrayé les gardes; et ceuxci, pour justifier leur lâcheté, auront eu recours à un moyen surnaturel. » LXXII. Les princes des prètres et le sanhédrin, en avouant la résurrection de JésusChrist, s'accusaient eux-mêmes d'une énorme injustice. Ils se prononçaient coupables, dans l'ordre civil, de la mort du Messie; dans l'ordre de la religion, du déicide. Il n'est que trop commun de voir des hommes placés entre un intérêt temporel et celui du salut, préférer le premier au second, et, surtout quand il y aurait de grands sacrifices à faire, soit de réputation, soit de fortune, faire plutôt celui de leur conscience. Une multitude d'autres exemples rend malheureusement celui-là très-probable. Le sanhedrin a dû naturellement croire que les soldats qui acceptaient son argent lui garderaient le secret. Il les connaissait, puisqu'il les avait choisis, et de plus il leur avait donné un si grand intérêt, qu'il avait droit de compter sur eux. D'un côté, une récompense, de l'autre, de grands chatiments; voilà les motifs qui déterminent les hommes au mal comme au bien; et le san hédrin les avait réunis pour s'assurer des soldats. Ce que je viens de dire du conseil, est aussi vrai des gardes. Ces hommes se trouvaient placés entre l'argent qu'on leur offrait (325) Postea Celsus quæ scripta sunt reprehendens, difficultatem objicit minime contemnendam. Si suam, inquit, divinam potentiam revera innotescere voluit, oportuit utique ut se suis adver pour trahir leur conscience, et le supplire qu'ils risquaient en lui obéissant. Combien peu d'hommes résistent à cette double tentation! Combien y en a-t-il qu'une situation pareille, et souvent même moins critique, rend prévaricateurs! Les soldats ont plus redouté le sanhedrin que l'ange. L'ange était éloigné: le sanhedrin était devant eux. La punition de la part de l'ange était incertaine: et dans le fait, il ne leur avait fait aucun mal: le supplice du sanhedrin était assuré. L'argent qu'ils tenaient était à leurs yeux préférable aux récompenses incertaines qu'ils pouvaient recevoir de l'autre côté. Toutes ces fausses probabilités, qu'on accumule dans l'objection, conduisent à une conséquence absurde. Il est aussi déraisonnable de supposer que les apôtres aient ravi le corps de leur Maître, de force et malgré les gardes, que de prétendre qu'ils l'ont dérobé subitement pendant leur sommeil. C'est une idée ridicule, de quelque côté qu'on l'envisage. Du côté des apôtres: leur timidité naturelle, le supplice que leur eût inévitablement attiré un crime aussi grave, un crime dont la preuve eût été si facile, un crime dont les juges eussent été leurs ennemis, ne permettent pas de croire qu'ils ebssent eu cette extravagante audace. Du côté du sanhedrin: s'il avait eu un si grave attentat à reprocher aux apôtres, ne les auraitil pas sévèrement punis. Aurait-ce été le pouvoir, ou l'intérêt, ou le désir qui lui aurait manqué? Du côté des gardes: si on avait employé contre eux une force majeure, quelle raison auraient-ils eue de débiter la fable de l'enlèvement furtif? Its se rendaient bien plus coupables, en avouant qu'ils avaient dormi contre leur consigne, qu'en déclarant qu'une troupe, à laquelle ils n'étaient pas en état de résister, les avait forcés de se retirer. Enfin, du côté de ceux mêmes qui proposent l'objection: leur nouvelle invention, comme nous l'avons observé, est aujourd'hui trop tardive; si elle eût été réelle, elle eût été connue dans le temps. Voici enfin l'objection que les ennemmis du christianisme proposent avec le plus de confiance, qu'ils répètent continuellement d'après les incrédules anciens (325), et par laquelle its prétendent faire tomber toutes les preuves que nous avons données de la résurrection. LXXIII. «Quel était le but des apparitions de Jésus-Christ dont on nous parle? C'était de prouver évidemment sa résurrection. II fallait donc que ces apparitions eussent le caractère nécessaire pour former une preuve. Ce caractère ne pouvait être autre que la publicité. En se montrant publiquement à toute la Judée, au peuple, aux chefs de la synagogue, à tous ceux qui l'avaient vu mourir, Jésus-Christ aurait rempli son objet. En ne se montrant qu'à un petit nombre sariis, suo judici, omnibus omnino ostenderet. (ORIGENES, contra Celsum, lib. 1, cap. 63). Nota. Dans les chapitres suivants, Origène répond alplement à cette difficulté. d'amis, il le manque absolument. Une résurrection publique aurait imposé silence à tous les contradicteurs, aurait forcé tout l'univers à croire; une résurrection secrète laisse un libre champ aux oppositions. Il répugneà la sagesse divine de ne pas prendre les moyens qui peuvent atteindre son but. L'objet était de faire croire en Jésus-Christ ceux qui ne croyaient pas en lui. C'était donc à eux principalement qu'il fallait se montrer, et non pas seulement à ceux qui y croyaient déjà. Il n'en aurait pas plus coûté de se produire à la nation entière qu'à quelques individus choisis. Le peuple juif a eu raison de rester dans son jucrédulité, puisqu'on n'a pas fait ce qui aurait été nécessaire et si facile pour l'en tirer. Tous les motifs engageaient Jésus-Christ à ressusciter publiquement. Quelle raison peuton donner ce ce qu'il est ressuscité secrètement ? » LXXIV. Cette objection rappelle les impiétés que vomissaient les Juifs au pied de la croix où ils avaient attaché Jésus-Christ. Qu'il descende tout à l'heure de sa croix et nous croyons en lui (326). Elle ressemble aussi au blasphème d'un athée de nos jours, qui, pour prouver son affreux système, défiait Dieu, s'il existe, disait-il, de le foudroyer à l'instant. C'est dans tous le même sentirent, le même raisonnement. Ils ont lous l'audacieuse présomption de prescrire impérieusement à Dieu les preuves qu'il doit douner des saintes vérités. A telle condition, et non autrement, ils voudront bien le croire. Voici quelle est la substance du raisonnement qu'on nous oppose. Jésus-Christ, après sa mort, ne s'est pas montré en public; done il n'est pas ressuscité. Il n'a pas été vu par les Juifs, donc il ne l'a pas été par ses disciples. Cet argument est-il bien convaincant? Tel fait n'est pas prouvé par tels témoins; done il n'est pas prouvé. Quand ils voient une vérité démontrée, nos adversaires s'avisent-ils de la révoquer en doute, parce qu'il lui manque un genre ou un degré de preuve qu'ils imaginent? Qu'importe que la résurrection soit prouvée de de telle manière, pourvu qu'elle le soit démonstrativement? Hétait, dit-on, facile à Jésus-Christ de don ner à sa résurrection une plus grande publicité, j'en conviens. La résurrection rendue plus publique serait plus abondamment prouvée; je le veux bien encore; mais elle ne serait pas pour cela plus certaine, puis que les preuves qui existent donnent une certitude complète, et excluent absoJument tout doute. en De ce que Jésus-Christ a pu aisément rendre témoins de sa résurrection tous les Juifs, s'ensuit-il qu'il l'ait dû? Pour soutenir cette étrange conséquence, il faudrait avalicer le principe, que Dieu est tenu de donner ases miracles les preuves les plus palpables (326) Similiter et principes sacerdotum illudentes cum scribis et senioribus, dicebant: Alios salvos fecit, se ipsum non potest salvum facere. Si rex Isrgel qui puissent exister; de ce qu'il en a la puissance, il faudrait conclure qu'il en a l'obligation. Et qui osera avancer un tel paradoxe? Dieu aurait sans doute la puissance, il aurait la facilité de nous donner la persuasion de sa religion sans aucun moyen extérieur, sans aucun raisonnement, et par une simple inspiration. Prétendra-t on, pour cela, qu'il y est tenu? Maître de se servir des motifs de crédibilité, il l'est également de leur donner le degré de force qu'il lui plaît; il est certainement dans la puissance divine, et même sans qu'il lui en coûte aucun effort, d'augmenter à l'infini les preuves des vérités qu'il daigne nous enseigner. On pourra done toujours se refuser à celles qu'il donnera, en disant qu'il aurait pu aisément en donner de plus fortes encore. Ce qui doit nous suffire, c'est que les motifs sur lesquels est fondée notre foi soient tels, que tout esprit raisonnable soit tenu d'y donner son assentiment. De tous les faits que l'universalité des hommes, et les incrédules comine les autres, regardent comme certains, il n'en est aucun qui soit plus complétement démontré que la résurrection. Que leur faut-il de plus pour en reconnaîtrə la certitude? Et comment les déistes pourront-ils répondre aux athées, qui retourneront contre eux, au sujet de l'existence de Dieu, l'argument qu'ils proposent contre sa résurrection? L'existence de Dieu pourrait avoir des preuves plus fortes. Dieu, s'il existe, pourrait, par exemple, se faire voir, se faire entendre à chacun de nous. L'existence de Dieu n'est donc pas suffisamment prouvée. La sagesse divine prend nécessairement les moyens propres à atteindre son but; c'est un principe incontestable: mais estelle obligée de prendre la totalité des moyens propres à remplir cet objet? Est-elle obligée d'employer plus de moyens qu'il ne faut pour produire cet effet? Voilà ce qu'il serait nécessaire de prouver, et ce qu'on ne prouvera jamais. Pourvu qu'elle mette en usage des moyens suffisants, on n'est pas en droit de lui demander davantage. On ne dira pas qu'un homme manque de sagesse, parce qu'il n'emploie pas dix degrés de force à ce qui n'en exige que cinq. La question est donc de savoir, nou pas si la résurrection pouvait avoir de plus nombreux, de plus puissants motifs de crédibilité, mais si elle en a de sutlisants pour soumettre notre croyance. En rendantsa résurrection aussi publique qu'elle pouvait être, Jésus-Christ aurait rempli son objet: cela est encore évident. Mais on veut qu'en ne la rendant pas aussi publique, il l'ait manqué; et cela est faux. Si les témoins de la résurrection réunissent, soit par leur nombre, soit par leur qualité, soit par les circonstances de leurs relations, tout ce qui est nécessaire pour imprimer à est, descendat nunc de cruce, et credimus ei. (Matth. xxvi, 41, 42.) Jeur témoignage la certitude, on doit les croire, quoiqu'ils eussent pu être plus nombreux. La résurrection, dit-on, a été secrète. Voilà une singulière expression. Est-ce un fait secret que celui qui a été vu de plus de cinq cents personnes? La résurrection a eu le degré de publicité que donnent à un événement cinq cents témoins oculaires. La difficulté des incrédules se réduit à demander pourquoi elle n'en a pas eu une plus grande. L'objet de la résurrection était de faire croire en Jésus-Christ ceux qui n'y croyaient pas. C'était donc, conclut-on de là, à eux principalement qu'il fallait se montrer. Si cette conséquence est juste, il faut l'admettre dans sa totalité: il faut prétendre que Jésus-Christ aurait dû, après sa résurrection, se faire voir à tous ceux qui ne croyaient pas en lui. Il aurait fallu, d'après ce raisonnement, qu'il se montrat non-seulement aux Juifs qui étaient à Jérusalem, mais à tous ceux qui étaient répandus par tout le monde; il aurait fallu qu'il allât aussi se présenter à tous les païens, qui ne croyaient pas plus en lui que les Juifs. La résurrection aurait eu alors une publicité plus grande encore que celle qu'exigent nos adversaires. Est-on, pour cela, en droit de l'exiger? Non sans doute. Pouramener à la foi, par le miracle de la résurrection, ceux qui ne croyaient pas en lui, il suffisait que Jésus-Christ donnât à ce miracle la certitude qui résulte des témoins qui n'ont ni pu être trompés, ni voulu tromper; et c'est ce qu'il a fait. Mais ces témoins, dit-on, étaient les disciples, les amis de Jésus-Christ; il n'était pas nécessaire qu'il se montrât à ceux-là. Je pourrais observer que la foi des disciples avait été fort affaiblie, qu'elle était même peut-être éteinte dans plusieurs par la mort ignominieuse de leur Maître; qu'il n'était donc nullement inutile qu'il la ranimat par la vue de sa résurrection: mais ce n'est seulement pas pour eux que Jésus-Christ leur est apparu; c'est pour tout l'univers, c'est pour toutes les générations. Il n'a pas voulu seulement des fidèles qui crussent sa résurrection, il a voulu des témoins qui l'attestassent et qui la fissent croire au monde. Et qui pouvait-il choisir qui mit à ce ministère plus de zèle que ceux qui, pendant trois ans, lui avaient été constamnent attachés? On ne considère, dans l'obection, que des disciples à persuader : il laut voir en eux des apôtres chargés de con (327) Voyez chapitre premier, numéro XXX et uiv. (328) Cogitaverunt autem et principes sacerdotum it et Lazarum interficerent, quia multi propter illum abibant ex Judæis, et credebant in Jesum. (Joan. x1, 10, 11.) - Prudenter attendite: siquidem multi quærunt et dicunt, quam ob causam cum resurrexisset, non statim Judæis apparuit. Verum supervacaneus et vanus est iste sermo. Si enim ad fidem illos pellecturus fuisset, post resurrectionem omnibus apparere non recusasset. Cæterum nequaquam eos se pellecturum fuisse. si post resurre vaincre les autres. Nous le répéterons done toujours, parce que c'est là le point de la question, le point unique, le point auquel il faut sans cesse revenir: les disciples ont ils été des témoins du fait qu'ils annoncaient, suffisants pour le rendre certain? S'ils l'étaient, comme nous l'avons abondamment démontré, il n'est pas vrai que les Juifs dussent rester dans l'incrédulité; puisque Jésus-Christ, se montrant à ses disciples, avait fait tout ce qu'il fallait pour les en retirer. On avance une autre proposition: c'est que la résurrection de Jésus-Christ, rendue aussi publique que sa mort, aurait imposé silence aux contradicteurs. Demandons aur incrédules qui proposent cette assertion, de quels contradicteurs ils parlent. Est-ce de ceux d'alors? est-ce de ceux d'à présent? est-ce des chefs de la synagogue? est-ce d'eux-mêmes ? D'abord comment peut-on prétendre que les chefs de la nation juive se seraient rendus au miracle de la résurrection, s'ils en avaient été témoins, quand on les voit résister constamment à tous les autres miracles que, pendant trois années consécutives, Jésus-Christ n'avait cessé d'opérer? Tous ces miracles avaient eu la publicité que demandent les incrédules. Le divin Sauveur les avait faits au conspect de tous les Juifs, à la vue même de ses ennemis les plus acharnés. Les possédés délivrés, les malādes guéris, les morts ressuscités par lui, étaient au milieu d'eux; et cependant ils s'obstinaient encore à ne pas croire en lui. Ils ne niaient pas, comme nous l'avons vu, la réalité de ces prodiges (327); ils en contestaient la conséquence. Forcés par l'évidence, ils avouaient qu'il les avait opérés: mais contre l'évidence, ils soutenaient que c'était par un pouvoir diabolique qu'il les avait opérés. Peu de jours avant sa propre résurrection, Jésus-Christ avait ressuscité trèspubliquement Lazare. Ce qu'avaient conclu les princes des prêtres de ce prodige, et de l'impression qu'il faisait sur le peuple, c'est qu'il fallait assassiner Lazare (328). Si les prodiges les plus solennels ne convainquaient pas les chefs de la synagogue, la publicité de sa résurrection ne les aurait pas persuadés davantage. Ce n'aurait été qu'un miracle de plus ajouté à une multitude d'autres. On a beau augmenter la lumière autour d'un homme qui ferme volontairement les yeux, on ne le fait pas voir plus clairement. ctionem illis apparuisset, per Lazarum indicavit. Cum enim hune quatriduanum mortuum, fætentem et corruptum suscitasset, et fecisset ut ligates institis in conspectum omnium prodiret, non solum illos ad fidem non attraxit, sed etiam irritavit; venientes enim, ipsum etiam interticere hac de causa voluerunt. Si ergo, cum alterum e mortuis excitasset non tamen crediderunt, si se ipsum 08tendisset a semetipso suscitatum, nonne in ipsum furore exarsissent? (S. JOAN. CHRYS., homil. Cur in Pentecoste, etc., n. 6.) Seraient-ce eux-mêmes, que lesincrédules modernes disent qui auraient été forcés de se sonmettre à la religion, si la résurrection de son auteur avait été aussi publique que sa mort? Il est difficile de croire que cette assertion soit sérieuse de leur part, quand on les voit nier les autres miracles de JésusChrist, qui, de son temps, avaient une notoriété, une publicité telles que ses ennemis étaient forcés de les avouer. Il en serait du prodige de la résurrection comme de tous les autres. H suffit de considérer les raisons par lesquelles its combattent les miracles, pour voir qu'ils les appliqueraient ce même à celui-ci. Les uns disent que tout miracle est impossible. Ce ne seraient pas ceux-là qui croiraient au miracle de la résurrection, s'il était plus public. Les autres disent qu'un fait miraculeux ne peut être cru tout au plus que par ceux qui le voient, et qu'aucun témoignage ne peut en donner la certitude. Quelque publique qu'eût été la résurrection, ils n'auraient aujourd'hui, pour y ajouter foi, que des relations de témoins. Qu'ils s'accordent donc avec euxmêmes; qu'ils cessent ou de soutenir soit l'impossibilité des miracles, soit l'impossibilité de les prouver par des témoignages, ou de prétendre qu'ils croiraient le miracle de la résurrection, s'il était certifié par un grand nombre de témoignages. au On demande les raisons pour lesquelles Jésus-Christ n'a pas donné à sa résurrection une plus grande publicité. Nous n'en rions qu'une à donner, et celle-là doit satisfaire tout esprit raisonnable. Il ne l'a pas voulu. Dieu ne peut-il pas avoir, dans sa sagesse, des raisons que nous ignorions? Aurions-nous l'audacieuse prétention de lui faire rendre compte de ses motifs? nous n'avons pas droit de nierun fait, parce que nous ignorons la raison de son existence: nous l'avons encore bien moins, quand le fait est l'œuvre immédiate de celui dont les pensées sont incompréhensibles et les voies impénétrables. Et à qui donc prétend-on que JésusChrist était obligé de se manifester avec évidence? A ce lâche gouverneur qui l'avait condamné contre sa conscience; à ce léger et crapuleux Hérode, qui l'avait indignement raillé; à ces prêtres, à ces docteurs, à ces pharisiens, qui n'avaient cessé de le poursuivre de leurs calomnies et de leurs intrigues, jusqu'à ce qu'ils l'eussent conduit sur le Calvaire; à ces Juifs furieux qui, comblés de ses bienfaits, avaient demandé sa mort à grands cris, et souhaité que son sang retombât sur eux et sur leurs enfants? (329) Denique resurrectionem suam... noluit alienis demonstrare, sed suis; alienis dico, non naturæ, sed vitio, quod semper est contra naturam.... Quod carnem suam resuscitavit, et discipulorum conspectibus et contactibus reddidit, ipsisque videntibus ascendit in cælum, ipsos ædificavit, et quid exspectare, quid prædicare deberent, evidentissima veritate demonstravit. Illos autem a quibus tanta mala usque ad mortem pertulerat, quasi de illo superato et extincto gloriantes, a opinione dere Par où tous ces hommes si criminels avatentils mérité le bienfait de son apparition (329)? Il est déraisonnable de prétendre que Dicu doive répandre ses graces plus abondamment, à mesure qu'on s'en rend plus indigne, et multiplier les preuves de sa foi à proportion qu'on y résiste davantage. En nous demandant la raison qui a pu engager Jésus-Christ à ne pas rendre sa résurrection aussi publique qu'elle eût pu l'être, les incrédules nous en indiquent eux-mêmes une très-vraisemblable. If aurait, disent-ils, forcé la croyance universelle; et c'est précisément ce qu'il ne voulait pas. Son intention était que sa résurrection fût crue, mais qu'elle le fût volontairement. Il a voulu que nous fussions obligés de la croire; il n'a pas voulu que nous y fussions contraints. Il nous a fait de cet article de foi un devoir; et, pour que nous le remplissions, il l'a fondé sur des preuves non-seulement suffisantes, mais surabondantes. Il ne nous en a pas fait une nécessité; et, en conséquence, il ne l'a pas muni de preuves tellement subjugantes, que nous fussions forcés d'y céder. Il est dans ses vues sages et bienfaisantes que notre foi soit à la fois motivée et méritoire. Sans motifs nous ne croirions point; sur des motifs qui forceraient notre assentiment, nous ne croirions pas librement. Il connaît, dans sa science intinie, le degré de lumière nécessaire pour nous imposer Fobligation de croire, le degré convenable pour qu'il reste à la foi un mérite. Les preuves qu'il donne à ses vérités religieuses, il les proportionne, d'une part', à notre intelligence, de l'autre, au mérite qu'il veut que nous acquérions. Et c'est encore dans lui une infinie miséricorde, de nous faire de la foi une vertu, qu'il récompense en la rendant si facile par les démonstrations dont il l'environne. CHAPITRE III. MIRACLES DES DISCIPLES DE JÉSUS-CHRIST. I. Jésus-Christ avait prédit que ceux qui croiraient en lui, opéreraient ainsi que lui des miracles. Nous voyons cette promesse formellement énoncée dans les évangiles. « En vérité, dit-il dans un endroit, celui qui croira en moi fera lui-même les œuvres que je fais, et il en fera de plus grandes encore (330). Tels sont, dit-il ailleurs, les prodiges qui suivront ceux qui croiront en moi: ils chasseront les démons en mon nom; ils parleront des langues nouvelles; ils manieront des serpents; s'ils boivent des choses mortelles, elles ne leur nuiront pas; ils imposeront les mains sur les malades, qui en liquit: ut quisquis eorum salute æterna salvus fieri vellet, hoc de illius mortui resurrectione crederet, quod ii qui viderunt si suis contestantibus prædicaverunt; et pro ea prædicatione similia perpeti non dubitaverunt. (S. AUGUSTIN., liber ad Honoratum, seu epist. 140, cap. 9, n. 25. (330) Amen, amen dico vobis, qui credit in me, opera quæ ego facio et ipse faciet, et majora hora faciet. (Joan. XIV, 2.) suite se porteront bien (331). » Les évangites ayant été composés postérieurement aux premières prédications des apôtres, ils ne sont que le récit mis en écrit, des faits que les apôtres et les autres témoins avaient publiés de vive voix. Des disciples de Jésus-Christ ont donc certainement ouvert leur carrière, non-seulement en rappelant aux Juifs les miracles de leur Maître et en publiant sa résurrection, mais encore en annonçant qu'ils avaient reçu de lui son pouvoir d'opérer des prodiges. Ils ont ensuite donné plus de force encore à cette déclaration, en la consignant dans leurs évangiles et en la publiant universellement. Cette proclamation si solennelle était un engagement formel qu'ils contractaient de faire aussi des miracles. Ils prenaient cet engagement envers leurs ennemis si acharnés contre eux, si puissants pour les punir s'ils manquaient à leur promesse. En le prenant, ce grand engagement, ils donnaient et au peuplejuif et à l'universalité des nations à qui ils portaient l'évangile, un moyen certain et en même temps un moyen facile, de reconnaître s'ils étaient véritablement les ministres du Tout-Puissant. En promettant des merveilles, ils attiraient sur eux les regards du monde, sur leurs œuvres son attention. Il ne fallait que des yeux pour voir s'ils guérissaient les maladies par la seule imposition des mains: que des oreilles pour s'assurer s'ils parlaient toutes sortes de langues. La déclaration publique qu'ils font de Jeur pouvoir miraculeux, est tout à la fois et une invitation adressée à tous les peuples d'examiner, d'observer, de scruter, de juger leurs œuvres, et un défi porté aux incrédules, soit de leur temps, soit même de tous les siècles de les trouver en faute. Ils ne se dissimulaient pas qu'ils seraient continuellement environnés d'hommes attentifs à les considérer, habiles à discerner leurs actions, ardents à les prendre en défaut. Ils savaient, à n'en pas douter, que leurs œuvres auraient pour témoins les magistrats juifs et idolatres qui avaient l'intérêt, le désir, l'autorité de les punir sur le moindre soupçon de fraude. Ils étaient donc bien sûrs de leur puissance pour l'annoncer avec une telle hauteur. Ils auraient été des insensés (et nous avons prouvé qu'ils ne l'étaient pas), si, sentant leur impuissance à opérer des prodiges, ils s'étaient avisés de promettre aussi publiquement des prodiges. (331) Signa autem eos qui crediderint, hæc sequentur: In nomine meo dæmonia ejicient, linguis loquentur novis, serpentes tollent; et si mortiferum quid biberint, non eis nocebit; super ægros manus imponent et bene habebunt. (Marc. xvi, 17, 18.) (332) At nemo turbetur apostolos sic imperfeetos videns. Nondum enim crux advenerat, nondum Spiritus gratia data erat. Si velis autem ipsorum virtutem ediscere, post hæc illos considera, ra, videbisque ipsos omni morbo animi superiores. (S. JOAN. CHRYS., in Matth., homil, 65; alias, 66, n. 2.) - Sed jam hic paulo ante timidus, qualis post adventum Spiritus exstiterit videamus. Certe Luca testante didicimus, contra sacerdotes et principes Qu'ils crussent en imposer en racontant les miracles de leur Maître, cela même, comme nous l'avons vu, eût été souverainementdéraisonnable; mais qu'ils eussent imaginé de tromper le monde entier sur leurs propres miracles, sur des miracles annoncés d'avance et sévèrement examinés, c'eût été une extravagance dont on ne connaît pas d'exemple. Un seul prodige annoncé et non effectué, un seul tenté sans succès, une seule fraude découverte, leur ministère est anéanti: un opprobre éternel devient leur partage, et ils sont livrés aux supplices que méritent les imposteurs. La promesse qu'ils font des miracles, en montrant leur assurance d'en opérer, est déjà un préjugé trèsfort en leur faveur. Mais voyons s'ils l'ont tenue, et s'ils ont accompli cette prophétie de leur Maître. Saivons-les dans celle carrière d'œuvres merveilleuses qu'ils vont parcourir. II. Le premier miracle de cette carrière des apôtres, c'est sur eux-mêmes qu'il est opéré (332): c'est celui qui les rend capables de tous ceux dont ils rempliront leur vie; c'est la descente du Saint-Esprit sur eux, dix jours après que Jésus-Christ fut remonté dans les cieux. III. Voudrait-on révoquer en doute ce grand prodige, et attaquer la véracité de l'écrivain sacré qui le rapporte dans les Actes des apôtres? Nous dirons qu'il est aussi complétement prouvé que tous les autres miracles dont nous avons démontré la réalité. C'est dans le Cénacle, il est vrai, loin des regards du public, que s'est passé le fait de la descente du Saint-Esprit. Mais il y avait dans le Cénacle environ cent vingt personnes, tant hommes que femmes. Tout le monde s'y trouvait rassemblé pour atten dre cet événement qui leur avait été prédit par Jésus-Christ avant son retour dans les cieux. Dira-t-on que ces personnes se sont trompées? Dira-t-on qu'elles ont voulu tromper? Pour soutenir la première hypothèse, il faudrait dire que toutes se sont fait illusion, et toutes la même illusion, sur un fait aussi frappant, qu'elles avaient prévu, qui leur était porsonnel, sur ses diverses circonstances, sur ce qu'elles avaient vu, entendu, éprouvé ensemble. Car il est dit dans le texte sacré, qu'un grand bruit s'étant fait entendre, semblable à celui d'un vent violent, des langues de feu étant appa rues et étant venues se poser sur chacun quanta Dominum auctoritate prædicaverit..... Ecce ille, paulo ante timidus, jam linguis toquitur, corascat miraculis, infidelitatem sacerdotum ac princi pum libera voce increpat, ad prædicandum Jesum exemplum auctoritatis cæteris prestat. Ne in nomine ejus loqui debeat verberibus prohibetur, nec tamen compescitur. Contemnit flagella cædentium, qui paulo ante requirentium verba timuerat, et qui ancillæ vires requisitus expavit, vires principum cæsus premit. Sancti enim Spiritus jam virtute solidatus, hujus mundi altitudines libertatis calce de. primebat. (GREGOR. Magn., Moral., lib. xvn, cap. 31, n. 49.) |