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rait soutenir leur extinction que par un miracle, soit en exaltant la matière, soit en anéantissant l'ame. Car nous savons bien que la puissance de Dieu pourrait rendre nos ames mortelles, tout immatérielles (ou immortelles par la nature seule qu'elles puissent être, puisqu'il les peut anéantir.

Or, cette vérité de l'immatérialité de l'ame est sans doute de conséquence. Car il est infiniment plus avantageux à la religion et à la morale, surtout dans les temps où nous sommes, de montrer que les ames sont immortelles naturellement, et que ce serait un miracle si elles ne l'étaient pas, que de soutenir que nos ames doivent mourir naturellement, mais que c'est en vertu d'une grace miraculeuse, fondée dans la seule promesse de Dieu, qu'elles ne meurent pas. Aussi sait-on depuis long-temps que ceux qui ont voulu détruire la religion naturelle, et réduire tout à la révélée, comme si la raison ne nous enseignait rien làdessus, ont passé pour suspects; et ce n'est pas toujours" sans raison. Mais notre auteur n'est pas de ce nombre. Il soutient la démonstration de l'existence de Dieu, et il attribue à l'immatérialité de l'ame une probabilité dans le suprême degré, qui pourra passer par conséquent pour une certitude morale; de sorte que je crois que, ayant autant de sincérité que de pénétration, il pourrait bien s'accommoder de la doctrine que je viens d'exposer, et qui est fondamentale dans toute la philosophie raisonnable. Autrement je ne vois pas comment on pourrait s'empêcher de retomber dans la philosophie ou fanatique (telle que la philosophie mosaïque de Fludd, qui sauve tous les phénomènes en les attribuant à Dieu immédiatement, et par miracle), ou barbare, comme celle de certains philosophes et médecins du temps passé, qui se ressentait encore de

la barbarie de leur siècle, et qu'aujourd'hui on méprise · avec raison, qui sauvaient les apparences en forgeant tout exprès des qualités occultes, ou facultés qu'on s'imaginait semblables à des petits démons ou lutins capables de faire sans façon tout ce qu'on demande; comme si les montres de poche marquaient les heures par une certaine faculté horodeictique, sans avoir besoin de roues, ou comme si les moulins brisaient les grains par une faculté fractive, sans avoir besoin de rien qui ressemblât aux meules. Pour cè qui est de la difficulté que plusieurs peuples ont eue de concevoir une substance immatérielle, elle cessera aisément (au moins en bonne partie) quand on ne demandera pás des substances séparées de la matière, comme en effet je ne crois pas qu'il y en ait jamais naturellement parmi les créatures.

INTRODUCTION.

§ I.

Combien il est agréable et utile de connaître l'Entendement humain.

PUISQUE l'Entendement élève l'homme au-dessus de tous les êtres sensibles, et lui donne cette supériorité et cette espèce d'empire qu'il a sur eux, c'est, sans doute, un sujet qui, par son excellence, mérite bien que nous nous appliquions à le connaître autant que nous en sommes capables. L'Entendement, semblable à l'œil, nous fait voir et comprendre toutes les autres choses, mais il ne s'aperçoit pas lui-même. C'est pourquoi, il faut de l'art et des soins pour le placer à une certaine distance, et faire en sorte qu'il devienne l'objet de ses propres contemplations. Mais, quelque difficulté qu'il y ait à trouver le moyen d'entrer dans cette recherche, et quelle que soit la chose qui nous cache si fort à nous-mêmes, je suis assuré néanmoins que tout ce que cet examen peut répandre de

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lumière dans notre esprit, tout ce que nous pourrons acquérir par là de connaissance sur notre entendement nous donnera non-seulement beaucoup de plaisir, mais nous sera d'une grande utilité pour nous conduire dans la recherche de plusieurs autres choses.

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Dans le dessein que j'ai formé d'examiner la certitude et l'étendue des connaissances humaines, aussi bien que les fondements et les degrés de croyance, d'opinion et d'assentiment qu'on peut avoir par rapport aux différents sujets qui se présentent à notre esprit, je ne m'engagerai point à considérer, en physicien, la nature de l'ame; à voir ce qui en constitue l'essence; quels mouvements doivent s'exciter dans nos esprits animaux, ou quels changements doivent arriver dans notre corps, pour produire, au moyen de nos organes, certaines sensations ou certaines idées dans notre entendement; et si quelques-unes de ces idées, ou toutes ensemble, dépendent, dans leur principe, de la matière ou non. Quelque 'curieuses et instructives que soient ces spéculations, je les éviterai, comme ne pouvant pas me con

duire directement au but que je me propose. Il suffira, pour le dessein que j'ai présentement en vue, d'examiner les facultés de connaître qui se rencontrent dans l'homme, en tant qu'elles s'exercent sur les objets qui se présentent à elles et je crois que je n'aurai pas tout-à-fait perdu mon temps à méditer sur cette matière. si, à l'aide d'une méthode claire et, pour ainsi dire, historique, je puis faire voir par quels moyens notre entendement vient à se former les idées qu'il a des choses, et que je puisse fournir quelque moyen d'apprécier la certitude de nos connaissances, et les fondements des opinions qu'on voit régner parmi les hommes: opinions si différentes, si opposées, si directement contradictoires, et qu'on soutient pourtant dans tel ou tel endroit du monde, avec tant de confiance, que qui prendra la peine de considérer les divers sentiments du genre humain, d'examiner l'opposition qu'il y a entre tous ces sentiments, et d'observer en même temps avec combien peu de fondement on les embrasse, avec quel zèle, avec quelle chaleur on les défend, aura peut-être sujet de soupçonner l'une de ces deux choses, ou qu'il n'y a absolument rien de vrai, óu que les hommes n'ont aucun moyen sûr pour' arriver à la connaissance certaine de la vérité.

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J.

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