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l'un de ses amis, devient amoureux de Mélite, et la presse tellement de le payer de retour qu'elle se voit forcée à révéler le secret de son mariage. Ariste, esclave d'une mauvaise honte, et craignant d'attirer sur lui les brocards qu'il a jusqu'alors lancés sur les époux, n'y veut point consentir, quoiqu'instruit de la passion du Marquis, par lui-même, et par Mélite, et quoique la malignité et l'indiscrétion de sa belle-sœur, Céliante, et celles de Finette, suivante de Mélite, l'exposent, à tous les momens, à voir découvrir ce qu'il s'efforce tant à cacher. Mais Géronte croyant toujours son neveu libre, et vouJant l'unir à une riche héritiere, qui est sa bellefille, a fait, sans l'en prévenir, toutes les démarches relatives à cette union, qu'il lui propose, et qu'il prétend lui faire accepter, en le menaçant de le déshériter s'il refuse. Ariste est, enfint, contraint à déclarer qu'il est l'époux de Mélite. Lisimon et Géronte sont contraints, à leur tour, d'approuver ce mariage secret. Géronte donne sa belle fille au Marquis du Lauret, que l'espoir d'une grande fortune, qu'she lui apporte dédommage de la perte de Mélite; et Céliante se voit aussi forcée de finir par épouser Damon, autre ami d'Ariste, et avec lequel elle a, depuis long-tems, de tendres engagemens, que ses caprices l'ont jusques-là toujours empêchée de réaliser.

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JUGEMENS ET ANECDOTES

SUR

LE PHILOSOPHE MARIÉ,

OU

LE MARI HONTEUX DE L'ÊTRE.

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CETTE Comédie, dont le fond du sujet est l'une des principales et l'une des plus intéressantes parties de l'histoire de Destouches comme nous l'avons dit dans sa Vie, est aussi l'une de ses meilleures Pieces. Plusieurs des caracteres en furent tracés d'après ceux qui composoient sa famille. Il peignit sa femme dans Mélite, la sœur de sa femme dans Céliante, son pere dans Lisimon, et se peignit, luimême, dans Ariste. Quant au Financier, Géronte, il paroît que ce fut pour trancher avec le caractere doux, confiant et facile de son JUGEMENS ET ANECDOTES, &c. vij pere, qu'il créa ce personnage impérieux et brus. que. Le personnage du Marquis du Lauret, celui de Damon et celui de Finette, sont aussi de son invention, et concourrent parfaitement à la conduite de toute la Piece. Aussi eut - elle un très-grand succès, pendant trente-six représentations de suite, dans sa nouveauté, et estelle restée au courant du répertoire, pour être une des Comédies rejouées le plus souvent; et c'est toujours avec le même plaisir que l'on la revoit. Malgré ce succès, soutenu et merité, cette Piece fut l'objet de plusieurs Critiques, que publierent cinq ou six anonymes, dans la même année où elle fut mise au Théatre. C'est ce qui engagea Destouches à composer et à faire représenter, au Théatre François, et imprimer, à Paris, aussi la même année, sa petite Comédie de L'Envieux que nous avons fait connoître, à la suite de sa Vie, dans le Catalogue de ses Pieces. Mais, outre la continuité du succès du Philosophe marié, sur le Théatre de la Capitale et sur tous ceux des Provinces de France, dont Destouches put être témoin et jouir pendant près de trente ans, il

fut bien vengé de toutes ces Critiques ridicules. et injustes par l'accueil que les Anglois firent à cette Comédie, traduite dans leur langue, par Kelly, et représentée, dans cette langue, sur le Théatre de Londres, en 1773, avec autant de réussite qu'elle en avoit obtenu et conservé sur tous ceux de chez nous, à ce que nous apprend le Chevalier de Mouhy, dans son Abrégé de l'Histoire du Théatre François.

Voici le jugement que porte d'Alembert de cette Comédie, dans son Eloge de Destouches, faisant partie de son Histoire des Membres de l'Académie Françoise, et une anecdote, assez plaisante, qu'il rapporte à l'occasion de cette Piece.

En accommodant au Théatre le sujet de son mariage, qui dut être tenu caché et dont le secret fut violé, Destouches y ajouta tout ce qui pou voit rendre ce sujet piquant sur la scene ; l'amande honorable faite à l'amour et au mariage par un Philosophe, qui, après avoir long-tems bravé l'un et l'autre, a fini par s'enchaîner secrettement à leur char; la crainte qu'il a de rendre publique sa défaite, toute chere qu'elle est à son cœur; les incartades et les brusqueries d'un trai

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