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C'est l'honneur de l'Angleterre d'avoir déposé, dans le berceau de ses colonies, le germe de leur liberté. Preque toutes, à leur fondation ou à peu près, reçurent des chartes qui conféraient aux colons les franchises de la mère patrie.

Et ces chartes n'étaient point un vain leurre, une lettre morte, car elles établissaient ou admettaient des institutions puissantes qui provoquaient les colons à déferdre leurs libertés, et à contrôler le pouvoir en le partageant; le vote des subsides, l'élection des grands conseils publics, le jugement par jurés, le droit de se réunire de s'entretenir des affaires communes.

Aussi l'histoire de ces colonies n'est-elle que le dével loppement pratique et laborieux de l'esprit de libert grandissant sous le drapeau des lois et des traditions d pays. On dirait l'histoire de l'Angleterre elle-même.

Ressemblance d'autant plus éclatante que les colonies d'Amérique, la plupart du moins et les plus consider bles, furent fondées ou prirent leur principal accroisse ment précisément à l'époque où l'Angleterre prépara ou soutenait déjà, contre les prétentions du pouvoir absolu, ces fiers combats qui devaient lui valoir l'honneur de donner au monde le premier exemple d'une grande nation libre et bien gouvernée.

De 1578 à 1704, sous Elizabeth, Jacques Ier, Charles le Long Parlement, Cromwell, Charles II, Jacques Guillaume III et la reine Anne, les chartes de la Virg nie, du Massachusetts, du Maryland, de la Caroline, d

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New-York, furent tour à tour reconnues, contestées, restreintes, élargies, perdues, reconquises; incessamnent en proie à ces luttes, à ces vicissitudes qui sont la condition, l'essence même de la liberté, car les peuples ibres ne sauraient prétendre à la paix, mais à la vicoire.

En même temps que des droits légaux, les colons vaient des croyances. Ce n'était pas seulement comme Anglais, mais comme chrétiens qu'ils voulaient être ibres, et ils avaient leur foi encore plus à cœur que leurs hartes. Les chartes n'étaient même, à leurs yeux, [u'une émanation et une image bien imparfaite de la rande loi de Dieu, l'Évangile. Leurs droits n'auraient ›oint péri quand les chartes leur auraient manqué. Par e seul élan de leur âme, soutenue de la grâce divine, Is les auraient puisés à une source supérieure et inacessible à tout pouvoir humain, car ils nourrissaient des entiments plus hauts que les institutions mêmes dont Is se montraient si jaloux.

On sait comment, au XVIIIe siècle, poussée par le progrès de la richesse, de la population, de toutes les orces sociales, et aussi par le cours impétueux de sa propre activité, la pensée humaine tenta la conquête du monde. Les sciences politiques prirent leur essor, et audessus des sciences, l'esprit philosophique, superbe, insatiable, aspirant à pénétrer et à régler toutes choses. Sans emportement, sans secousse, plutôt en suivant sa pente qu'en se jetant dans des voies nouvelles, l'Améri

que anglaise entra dans ce grand mouvement. Les idées philosophiques vinrent s'y associer aux croyances religieuses, les conquêtes de la raison aux possessions de la foi, les droits de l'homme à ceux du chrétien.

C'est une belle alliance que celle du droit historique et du droit rationnel, des traditions et des idées. Les peuples y gagnent en énergie aussi bien qu'en prudence.. Quand des faits anciens et respectés dirigent l'homme sans l'asservir, et le contiennent en le soutenant, il peut avancer et s'élever sans courir le risque de se laisser emporter au vol téméraire de son esprit, pour aller se briser sur des écueils inconnus, ou s'engourdir de lassitude

Et lorsque, par une autre alliance encore plus belle et plus salutaire, les croyances religieuses se mariert. dans l'esprit même de l'homme, au progrès général des idées, et la liberté de la raison à la fermeté de la fo c'est alors que les peuples peuvent se confier aux inst tutions les plus hardies. Car les croyances religieuses sont d'un inappréciable secours au bon gouvernement des affaires humaines: pour se bien acquitter de sa tâche, en ce monde, l'homme a besoin de la regarder d'ea haut; si son âme n'est qu'au niveau de ce qu'il fait, i' tombe bientôt au-dessous et devient incapable de l'accomplir dignement.

Tel était, dans les colonies anglaises, l'heureux état de l'homme et de la société lorsque, par une arrogante agression, l'Angleterre entreprit de disposer, sans le aveu, de leur fortune et de leur destinée.

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L'agression n'était pas nouvelle, ni tout à fait arbiraire; elle avait aussi ses fondements historiques, et ouvait se croire quelque droit.

C'est le grand art social d'accorder les pouvoirs divers, n assignant à chacun sa sphère et sa mesure accord oujours douteux et agité, mais qui peut cependant être btenu, par la lutte même, au degré qu'exige impérieuement l'intérêt public.

Il n'est pas donné aux sociétés naissantes d'atteindre ce difficile résultat. Non qu'aucun pouvoir essentiel soit jamais absolument méconnu et aboli : tous les pouvoirs au contraire y existent et s'y manifestent, nais confusément, chacun pour son compte, sans lien nécessaire ni juste proportion, et de façon à amener, on la lutte qui conduit à l'accord, mais le désordre qui rend la guerre inévitable.

Dans le berceau des colonies anglaises, à côté de leurs ibertés et consacrés par les mêmes chartes, trois pouvoirs différents se rencontraient la couronne, les propriétaires fondateurs, compagnies ou individus, et la mère patrie. La couronne, en vertu du principe monarchique, avec ses traditions venues de l'Église et de l'Empire. Les propriétaires fondateurs à qui était faite la concession du territoire, en vertu du principe féodal qui attache à la propriété une part considérable de la souveraineté. La mère patrie, en vertu du principe colonial qui, de tous temps et chez tous les peuples, par une liaison naturelle de faits et d'idées, a attribué à la

métropole un grand empire sur les popula

de son sein.

ns sorties

Dès l'origine, et dans les événements mme dans les chartes, la confusion fut extrême entre es pouvoirs, tour à tour dominants ou abaissés, uns ou divisés, tantôt protégeant, l'un contre l'autre, les colons et leurs franchises, tantôt les attaquant de concert. Au sein de cette confusion et de ces vicissitudes, ils trouvaient tous des titres à invoquer, des faits à alléguer à l'appui de leurs actes ou de leurs prétentions.

Au milieu du XVIIe siècle, quand le principe monar chique succomba en Angleterre avec Charles Ier, on pu croire un moment que les colonies en profiteraient pourt s'affranchir de son empire. Quelques-unes, en effet, ket Massachusetts surtout, peuplé de fiers puritains, se mon trèrent disposées, sinon à rompre tout lien avec la me tropole, du moins à se gouverner seules et par leurs propres lois. Mais le Long Parlement, au nom du pri cipe colonial, et aussi en vertu des droits de la couronne dont il héritait, maintint, avec modération, la suprém tie britannique. Cromwell, héritier, à son tour, du Lon Parlement, exerça le pouvoir avec plus d'éclat, et parre, une protection habile et ferme, prévint ou réprim dans les colonies, royalistes ou puritaines, toute velleite Ce d'indépendance.

Ce fut pour lui une œuvre facile. Les colonies, à cette époque, étaient faibles et divisées. La Virginie, vers 16Mar ne comptait que trois ou quatre mille habitants,

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