Images de page
PDF
ePub

ais au parti qui occupait alors le pouvoir: «Ses plus fanatiques sectateurs n'hésitent pas à reconnaître qu'il a, dans cette circonstance, agi avec trop de précipitation, et par là compromis la cause qu'il voulait servir,» écrivait Washington. «Il prétend établir assez fermement son influence dans ce pays pour dominer le gouvernement et contrôler sa politique : de nouvelles preuves démontrent plus clairement chaque jour « l'existence d'un pareil dessein, et, chose triste à dire, << au nom d'une méfiance réelle ou simulée contre les << intrigues britanniques, un grand parti remue ciel et « terre pour seconder les tentatives des Français2. »

Le directoire avait, en effet, « compromis la cause « qu'il voulait servir. » John Adams fut nommé Président. Washington allait quitter le pouvoir. Ses sentiments à l'égard de la France étaient entièrement changés: « La conduite de la France envers ce pays me pa<< raît outrageante au delà de toute expression. Rien ne «<l'autorise, ni son traité avec nous, ni le droit des « gens, ni les principes de l'équité; elle n'a pas même « pour elle le respect des apparences. On pouvait se

<< établie nous serons en perte. Quand nous l'aurons établie dans << nos rapports avec tous les peuples, nous ne pourrons ni gagner ni perdre; mais nous serons moins exposés à des visites vexa<< toires en mer. »-(Jeff. Mem. and Corr., t. III, p. 268.)

En reconnaissant à l'Angleterre le droit de saisir les marchandises ennemies à bord des navires américains, le traité de 1794 n'introduisait donc pas une nouveauté et n'autorisait pas les actes de représailles ordonnés par l'arrêté du directoire du 2 juillet 1796 Washington était d'ailleurs tout prêt à accorder à la France le droit qu'il reconnaissait à l'Angleterre, et à modifier en ce sens le traité de 1778.

1 Novembre 1796.

6 janvier 1797.

Wash. Writ., t. XI, 179:
P.

« flatter que la nation française tiendrait compte d « semblables considérations. Quant à ses protestations « d'amitié et de tendre attachement pour nous, je « n'avais fondé aucun espoir là-dessus; j'avais bich « pensé qu'elles nous seraient prodiguées aussi longtemps qu'on y trouverait intérêt puis retirees des qu'on en serail venu à découvrir que rien ne pe <«< nous arracher à cette neutralité stricte, que nous « avons adoptée et maintenue avec persévérance.... « C'est une chose avérée, et dont l'histoire fait foi, que « l'humeur turbulente des Français et la politique « naturelle de leur nation les portent à vouloir toujours « agir sur les gouvernements étrangers, ouvertement « ou en cachette, par la menace ou les caresses. .. « Quand les documents que je fais publier auront « paru, les honnêtes gens, ceux même dont l'esprit est << asservi aux idées françaises, s'apercevront que la « France n'a point à notre reconnaissance autant de « droits qu'on le suppose en général'. »

La France portait le poids de toutes les fautes et de toutes les folies commises par cette longue série de despotes incapables dont elle avait trop patiemment supporté le joug. L'influence légitime que lui avait donnee en Amérique la politique de Louis XVI fut compromise, du jour où elle fut mise au service des passions révolutionnaires, et où elle devint redoutable à tout ce que la nation américaine avait de gens honnètes et sensés. Au milieu des conseils de justice, de modération et de prudence que Washington adressait à ses concitoyens dans sa lettre d'adieu, comme un testament

1 Janvier 1797. — Wash. Writ., t. XI, p. 179, 180, 181, 186.

-

litique, retentissaient des paroles de défiance contre nation qui avait le plus contribué à l'affranchissement es États-Unis : « Soyez justes et loyaux envers tous les peuples; vivez en paix et en bonne harmoníe avec tous. La religion et la morale vous en font une loi; se pourrait-il que la bonne politique ne le prescrivît point?... Se pourrait-il que la Providence n'eût établi (aucun lien entre la félicité d'une nation et sa vertu?... «Fuyez ces antipathies invétérées et cet aveugle attache«<ment pour certains Etats qui rendent un peuple l'es<«< clave de ses passions.... Fuyez ces haines qui poussent « les gouvernements à la guerre, en dépit des calculs les « plus sages de la politique, souvent au prix de la li« berté.... Ne vous laissez point emporter par ces affec<< tions passionnées pour un peuple.... qui permettent à « des citoyens ambitieux, corrompus ou aveugles, de << trahir ou de sacrifier les intérêts de leur propre pays << sans devenir odieux, quelquefois en devenant d'autant plus populaires.... Que d'occasions ainsi offertes aux << puissances étrangères de s'immiscer dans les factions « domestiques, de pratiquer l'art de la séduction, de « pervertir l'opinion, d'influencer ou d'intimider les <«< conseils publics!... La jalousie d'un peuple libre (je « vous conjure de m'en croire, chers concitoyens) doit « être constamment éveillée contre les ruses perfides <«< des influences étrangères. Ce sont là, les leçons de « l'expérience et de l'histoire nous l'enseignent, les <«< plus mortels ennemis du gouvernement républi« cain '. »

1 Wash. Writ., t. XII, p. 228-230.

et

CHAPITRE XVI.

4 mars 1797-14 décembre 1799.

hington à Mount Vernon.-La guerre entre la France et les États-Unis vient probable. Washington est nommé général en chef des armées éricaines.-Ses démêlés avec le Président.-Mort de Washington.

Ioins de trois mois après avoir quitté Philadelphie e pouvoir, Washington écrivait de Mount-Vernon à vier Wolcott, secrétaire du Trésor : « On fait bien des onjectures sur les motifs qui ont décidé le Président convoquer le Congrès à cette époque de l'année; on -rétend qu'il est question de mettre un embargo : ous qui êtes acteur sur le grand théâtre, vous avez mieux que personne à quoi il faut s'en tenir à-dessus. Quant à moi, m'étant détourné des grands hemins de la vie publique pour entrer dans les étroits entiers de la vie privée, je laisse toutes ces questions l'examen de ceux qui sont chargés des intérêts de État, et, comme c'est le devoir de tout bon citoyen, e suis prêt à me ranger aux décisions des pouvoirs ublics,' quelles qu'elles puissent être 1. » Et à

15 mai 1797.-Wash. Writ., t. IX, p. 198.

« PrécédentContinuer »