aux chefs du mouvement en Amérique, et ils n'avaient ant tardé à proclamer la révolution qu'ils avaient accomlie que pour préparer l'esprit du peuple à une idée ui blessait les vieilles traditions, et pour ménager les midités de cœur ou de conscience de certains membres u Congrès. Ces précautions ont valu aux hommes État américains le reproche d'une grande duplicité de angage et de conduite. Quelques-uns d'entre eux l'ont Deut-être mérité; mais il ne saurait atteindre Washingon. Washington n'était point de ceux que la vie poliique corrompt. Il n'avait ni l'insouciance de caractère, ni la finesse et la subtilité d'esprit, ni les passions violentes et personnelles qui détournent trop souvent de la droiture des cœurs naturellement honnêtes. Trop simple et trop digne pour avoir le goût de la ruse et des è détours, il était trop fort et trop confiant dans l'emploi de la force pour croire à leur efficacité. Loin de cacher ses idées sur l'indépendance, Washington fut toujours d'avis qu'il était politique de proclamer le plus tôt possible le but que poursuivait la majorité du Congrès. C'était, selon lui, la meilleure façon d'enlever à ses conI citoyens toute pensée et tout moyen de reculer, et de fermer la porte à des négociations qui, dans l'état d'incertitude où étaient encore beaucoup d'esprits, pouvaient devenir dangereuses : « Si tout le monde était de << mon avis », écrivait-il au mois de février 1776, « les << ministres anglais apprendraient, en peu de mots, où <«< nous en voulons venir. Je proclamerais, d'un ton « mâle et sans détour, nos griefs et notre résolution << d'obtenir justice. Je leur dirais que nous avons beau« coup supporté, que nous avons longtemps et ardem 90 PROCLAMATION DE L'INDÉPENDANCE (4 JUILL, 1776 tr et d P « ment désiré une réconciliation honorable, et qui No « nous l'a refusée. J'ajouterais que nous nous sommes <«< conduits comme de fidèles sujets, que l'esprit « liberté, est trop puissant dans nos cœurs pour q <«< nous nous soumettions jamais à l'esclavage, et p « nous sommes bien décidés à rompre tout lien ave « un gouvernement injuste et dénaturé, si notre serv « tude peut seule satisfaire un tyran et son ministère d «bolique. Et je leur dirais tout cela, non pas en termes « couverts, mais avec des expressions aussi claires « que la lumière du soleil en plein midi1. » Ce fut s ce plan, mais avec plus de prétentions philosophiquese oratoires, que Jefferson rédigea la Déclaration d'inde pendance. Elle fut adoptée par le Congrès à l'unate mité, unanimité malheureusement un peu factice. P l'obtenir, il avait fallu briser ou adoucir de vives résis tances, et l'État de New-York, qui avait envoyé le dernier son adhésion, ne l'avait donnée qu'à regret, et après plusieurs refus successifs. Les loyalistes, revenus de leur premier effroi, repre naient confiance. Leur oreille s'était faite au bruit, leur cœur au danger, et avec le temps, ils avaient appris à lutter contre le torrent révolutionnaire, devenu, avec le temps, moins irrésistible. A New-York, l'armée continentale suffisait à peine pour les contenir, et la présence du général Howe qui, depuis le 29 juin, attendait en rade une occasion favorable pour attaquer Washington, encourageait leurs manœuvres et leurs complots. on contents de semer l'agitation dans le peuple, d'enaver la levée des milices, d'accaparer les vivres, de ›rrespondre avec l'ennemi, et de se livrer à toutes les enées d'une opposition sourde et perfide, ils préluaient à des hostilités ouvertes, en formant des companies de volontaires royaux, et en menaçant la sûreté t la vie du général en chef. Des mesures de rigueur evinrent nécessaires. Washington n'hésita point à les rendre. On fusilla un soldat qui s'était laissé séduire; on mit la main sur les principaux chefs loyalistes, et 'on éloigna de la ville les suspects. Personne moins que Washington n'a invoqué la raison d'État pour couvrir des actes arbitraires et injustes; personne n'a moins abusé du pouvoir, et montré plus de respect pour la liberté; mais, dans les situations critiques et décisives, personne n'a subordonné avec plus d'inflexibilité les fantaisies et les intérêts particuliers à l'intérêt général, et ne s'est moins arrêté à de vains scrupules de forme et de légalité. Ce n'était pas qu'il affectât le moindre mépris pour les questions de forme : par habitude comme par goût, il y attachait, au contraire, une grande importance, et lorsque sa dignité ou celle de son pays était en jeu, il veillait, avec la susceptibilité jalouse d'un Anglais et d'un gentilhomme, à l'observation des règles les plus strictes de la politesse et de l'étiquette. Dans ses rapports avec les généraux de George III, il fut toujours à cet égard aussi ferme qu'exigeant, et tant qu'ils ne voulurent pas reconnaître son rang, et adopter dans leurs lettres les formules d'usage entre généraux ennemis, il refusa de correspondre avec eux, dût le service en souf frir. La nécessité d'adopter une convention po l'échange des prisonniers contraignit enfin le génér Howe à céder à de si justes prétentions, et de ce mment, Washington fut traité, non plus comme le che des sujets révoltés de la Grande-Bretagne, mais comme le général d'une puissance indépendante et ennemie. C CHAPITRE VI. 1776-1778. Campagne de 1776.-Washington évacue Long-Island et New-York.-Son mouvement de retraite à travers le New-Jersey.-11 reprend l'offensive et bat les Anglais à Trenton et à Princeton.-Nécessité de réformer l'organisation militaire.-Le Congrès confie à Washington des pouvoirs dictatoriaux.-Préjugés du général contre la France.-Le marquis de La Fayette.Campagne de 1777.-Plans des généraux anglais. -Bataille de la Brandywine.-Les Anglais s'emparent de Philadelphie.-Bataille de Germantown. -Camp de Valley Forge.-Capitulation de Saratoga. En évacuant Boston, le général Howe avait formé, avons-nous dit, un double plan : s'emparer de NewYork, et soulever les colonies du midi contre les républicains, par une vigoureuse diversion. La seconde partie de ce plan avait déjà échoué. Avant de quitter Halifax, pour se rendre devant New-York, il avait envoyé dans les Carolines un corps d'armée considérable, sous les ordres du général Clinton'. Mais les mouvements des loyalistes ayant été mal combinés, leur insurrection avait éclaté trop tôt, et Clinton la trouva déjà comprimée quand il débarqua. Après avoir essuyé un grand échec devant Charlestown, il reconnut l'impossibilité 1 Mai 1776. 2 23 juin 1776. |