L'avarice, chap. XXII. La lésine, chap. x. La vanité, chap. XXI. On pourra comparer ce tableau avec celui des vertus et des vices, selon Aristote, qui se trouve dans le chap. xxvi du Voyage du jeune Anacharsis, et avec les développements que le philosophe grec donne à cette théorie dans son ouvrage de morale adressé à Nicomaque. (2) L'opinion de la Bruyère et d'autres traducteurs, que Théophraste annonce le projet de traiter dans ce livre des vertus comme des vices, n'est fondée que sur une interprétation peu exacte d'une phrase de la lettre à Polyclès, qui sert de préface à cet ouvrage. Voyez à ce sujet la note 3 sur ce morceau, dont même on ne peut en général rien conclure avec certitude, parce qu'il paraît être altéré par les abréviateurs et les copistes. Il est même à peu près certain qu'il s'y trouve une erreur grave sur l'âge de Théophraste; car l'opinion de saint Jérôme sur cet âge, que la Bruyère appelle, dans la phrase suivante, l'opinion commune, a au contraire été rejetée depuis par les meilleurs critiques qui se sont occupés de cet ouvrage, et par le célèbre chronologiste Corsini. D'après Diogène Laerce, Théophraste n'a vécu en tout que quatre-vingt-cinq ans, tandis que l'avant-propos des Caractères lui en donne quatre-vingtdix-neuf. Ce ne peut être que par distraction que la Bruyère dit quatre-vingt-quinze ans. (3) Les manuscrits ne varient point à ce sujet; mais ils paraissent, ainsi que je l'ai déjà observé, n'être tous que des copies d'un ancien extrait de l'ouvrage original. Les Caractères dont parle ici la Bruyère ont été trouvés depuis dans un manuscrit de Rome; ils ont été insérés dans cette édition, ainsi que d'autres additions trouvées dans le même manuscrit. (Voyez la préface, et la note I du chapitre xvI.) (4) C'est Diogène Laërce qui nous apprend que Ménandre fut disciple de Théophraste; la Bruyère a fait ici un extrait suffisamment étendu de la Vie de notre philosophe donnée par Diogène. On sait que Ménandre fut le créateur de ce qu'on a appelé la nouvelle comédie, pour la distinguer de l'ancienne et de la moyenne, qui n'étaient que des satires personnelles assez amères, ou des farces plus ou moins grossières. Les anciens disaient de Ménandre qu'on ne savait pas si c'était lui qui avait imité la nature, ou si la nature l'avait imité. Théophraste a écrit un livre sur la comédie, et Athénée nous apprend (livre Ier, chap. XXXVIII, page 78 du premier volume de l'édition de mon père) que dans le débit de ses leçons il se rapprochait en quelque sorte de l'action théâtrale, en accompagnant ses discours de tous les mouvements et des gestes analogues aux objets dont il parlait. On raconte même que, parlant un jour d'un gourmand, il tira la langue et se lécha les lèvres. (5) Un autre que Leucippe, philosophe célèbre, et disciple de Zénon. (La Bruyère.) Celui dont il est question ici n'est point connu d'ailleurs. D'autres manuscrits de Diogene Laërce l'appellent Alcippe. (6) « Quis uberior in dicendo Platone? Quis Aristotele nervosior? Theophrasto dulcior? » (Cap. XXXI.) (7) Dans ses Tusculanes (livre V, chap. Ix), Cicéron appelle Théo phraste le plus élégant et le plus instruit de tous les philosophes; mais ailleurs il lui fait des reproches très-graves sur la trop grande importance qu'il accordait aux richesses et à la magnificence, sur la mollesse de sa doctrine morale, et sur ce qu'il s'est permis de dire que c'est la fortune et non la sagesse qui règle la vie de l'homme. (Voy. Acad. Quæst. lib. I, cap. Ix; Tusc. V, Ix; Offic. II, xvi, etc.) Il est vrai que Cicéron met la plupart de ces reproches dans la bouche des stoïciens qu'il intro duit dans ses dialogues; et d'autres auteurs nous ont conservé des mots de Théophraste qui contiennent une appréciation très-juste des richesses et de la fortune. « A bien les considérer, disait-il, selon Plutarque, les << richesses ne sont pas même dignes d'envie, puisque Callias et Isménias, <«<les plus riches, l'un des Athéniens, et l'autre des Thébains, étaient « obligés, comme Socrate et Epaminondas, de faire usage des mêmes «< choses nécessaires à la vie. — La vie d'Aristide, dit-il, selon Athénée, « était plus glorieuse, quoiqu'elle ne fût pas, à beaucoup près, aussi « douce que celle de Smindyride le Sybarite, et de Sardanapale. " La << fortune, lui fait encore dire Plutarque, est la chose du monde sur laquelle on doit compter le moins, puisqu'elle peut renverser un « bonheur acquis avec beaucoup de peine, dans le temps même où l'on << se croit le plus à l'abri d'un pareil malheur. » (8) Philosophe célèbre, qui suivit Alexandre dans son expédition, et devint odieux à ce conquérant par la répugnance qu'il témoigna pour ses mœurs asiatiques. Alexandre le fit trainer prisonnier à la suite de l'armée, et, au rapport de quelques historiens, le fit mettre à la torture et le fit pendre, sous prétexte d'une conspiration à laquelle il fut accusé d'avoir pris part. (Voyez Arrien, de Exped. Alex., lib. IV, cap. XIV.) (9) Xénocrate succéda dans l'Académie à Speusippe, neveu de Platon. C'est ce philosophe que Platon ne cessait d'exhorter à sacrifier aux Graces, parce qu'il manquait absolument d'agrément dans ses discours et dans ses manières. Il refusa, par la suite, des présents considérables d'Alexandre, en faisant observer aux envoyés chargés de les lui remettre la simplicité de sa manière de vivre. C'est lui aussi que les Athéniens dispensèrent un jour de prêter un serment exigé par les lois, tant ils estimaient son caractère et sa parole. (10) Cicéron dit, au sujet d'Aristote et de Théophraste de Finibus, fib. V, cap. IV): « Ils aimaient une vie douce et tranquille, consacrée « à l'observation de la nature et à l'étude; une telle vie leur parut la plus << digne du sage, comme ressemblant davantage à celle des dieux. » (Voyez aussi Ep. ad Att. II, XVI.) Mais il parait que cette douceur approchait beaucoup de la mollesse, non-seulement par les reproches de Cicéron que je viens de citer, et par les paroles de Sénèque (de Ira, lib. I, cap. xii et xv), mais encore par le témoignage de Télès, conservé par Stobée, qui nous apprend que ce philosophe affectait de n'admettre dans sa familiarité que ceux qui portaient des habits élégants, et des souliers en escarpins et sans clous, qui avaient une suite d'esclaves, et une maison spacieuse employée souvent à donner des repas somptueux, où le pain devait être exquis, le poisson et les ragoûts choisis, et le vin de la meilleure qualité. Hermippus, cité par Athénée, dans le passage dont j'ai déjà parlé, dit que Théophraste, lorsqu'il donnait ses leçons, était toujours vêtu avec beaucoup de recherche, et qu'ainsi que d'autres philosophes de son temps, il attachait une grande importance à savoir relever sa robe avec grâce. (11) Il y a deux auteurs du même nom : l'un philosophe cynique, l'autre disciple de Platon. (La Bruyère.) Mais un Ménédème, péripatéticien, serait trop inconnu pour que cette histoire que raconte AuluGelle (liv. XIII, chap. v), et que Heumann (in Actis Erud., tom. III, page 675) traite de fable, puisse lui être appliquée. Pour donner à ce récit quelque degré de vraisemblance, il faut lire Eudème, ainsi que plusieurs savants l'ont proposé. Ce philosophe, né dans l'ile de Rhodes, était un des disciples les plus distingués d'Aristote, qui lui a adressé un de ses ouvrages sur la morale, à moins que cet ouvrage ne soit d'Eudème lui-même, comme plusieurs savants l'ont cru. (12) Après la mort de Théophraste, ils passèrent à Nélée, son disciple, par les successeurs duquel ils furent par la suite enfouis dans un lieu humide, de crainte que les rois de Pergame ne les enlevassent pour leur bibliothèque. On les déterra quelque temps après, pour les vendre à Apellicon de Téos; et, après la prise d'Athènes par Sylla, ils furent transportés à Rome par ce dictateur. Ils avaient été fort endommagés dans le souterrain où ils avaient été cachés. (13) Un autre que le poëte tragique. (La Bruyère.) (14) On avait accusé notre philosophe d'athéisme, et nous voyons dans Cicéron (de Nat. Deor. lib. I, cap. xII) que les épicuriens lui reprochaient l'inconséquence d'attribuer une puissance divine tantôt à un esprit, tantôt au ciel, d'autres fois aux astres et aux signes célestes. La célèbre courtisane épicurienne Léontium a combattu ses idées dans un ouvrage écrit, au rapport de Cicéron, avec beaucoup d'élégance. Stobée nous a conservé un passage de Théophraste où il dit qu'on ne mérite point le nom d'homme vertueux sans avoir de la piété, et que cette piété consiste, non dans des sacrifices magnifiques, mais dans Thommage qu'une âme pure rend à la Divinité. Du Rondel, qui a fait imprimer, en 1686, sur le chapitre de Théophraste qui traite de la superstition, un petit livre en forme de lettre adressée à un ami qu'il ne nomme point, mais dans lequel il est aisé de reconnaître le célèbre Bayle, attribue à Théophraste un fragment assez curieux où l'on cherche à prouver que la croyance universelle de la Divinité ne peut être que l'effet d'une idée innée dans tous les hommes. Il dit que ce morceau a été tiré de certaines lettres de Philelphe par un parent du comte de Pagan; mais je l'ai vainement cherché dans ces intéressantes lettres d'un des littérateurs les plus distingués du quinzième siècle; et il ne peut être que supposé, ou du moins altéré, parce qu'il y est question du stoïcien Cléanthe, postérieur à Théophraste. Le seul trait de ce morceau qu'on puisse attribuer avec fondement à notre philosophe est celui que Simplicius, dans ses Commentaires sur Épictète, page 357 de l'édition de mon père, lui attribue aussi. C'est la mertion du supplice des acrothoïtes, engloutis dans le sein de la terre parce qu'ils ne croyaient point aux dieux. Au reste, les accusations d'athéisme avaient toujours des dangers pour leurs auteurs, si elles n'étaient point prouvées. (Voyez le Voyage du jeune Anacharsis, chap. XXI.) (15) Dans l'ouvrage intitulé, Qu'on ne saurait pas même vivre agréa blement selon la doctrine d'Epicure, chap. xi, et dans son traité contre l'épicurien Colothès, chap. xxix, ce trait et le Caractère de l'oligarchie tracé par Théophraste prouvent que c'était plutôt par raison et par circonstance, que par caractère ou par intérêt, que ce philosophe fut attaché au parti aristocratique d'Athènes. ( Voy. à ce sujet la préface de M. Coray, page 23 et suivantes. ) (16) Un autre que le fameux sculpteur anglais. (La Bruyère.) (17) Il parait qu'il devait l'amitié de ces personnages illustres à son maitre Aristote, précepteur d'Alexandre. Il adressa à Cassandre son traité de la Royauté, dont on ne trouve plus que le titre dans la liste de ses ouvrages perdus. Ce général, fils d'Antipater, disputait à Polysperchon la tutelle des enfants d'Alexandre; et les tuteurs finirent par faire la paix, après avoir assassiné chacun celui des deux enfants du roi qu'il avait en son pouvoir. Pendant leurs dissensions, Polysperchon, qui protégeait le parti démocratique d'Athènes, y conduisit une armée, et renversa le gouvernement aristocratique qu'y avait établi Antipater; mais par la suite Cassandre vint descendre au Pirée, rétablit, à quelques modifications près, l'aristocratie introduite par son père, et mit à la tête des affaires Démétrius de Phalère, disciple et ami de Théophraste. (Voyez Diodore de Sicile, liv. XVIII; et Coray, pag. 208 et suiv.) (18) << Theophrastus moriens accusasse naturam dicitur quod cervis et « cornicibus vitam diuturnam, quorum id nihil interesset, hominibus, « quorum maxime interfuisset; tam exiguam vitam dedisset; quorum «<si ætas potuisset esse loginquior, futurum fuisse ut, omnibus perfec<< tis artibus, omni doctrina vita hominum erudiretur. » ( Tusc. lib. III, cap. XXVIII.) (19) Epist. ad Nepotianum. « Sapiens vir Græciæ Theophrastus, «< cum expletis centum et septem annis se mori cerneret, dixisse fertur << se dolere quod tum egrederetur e vita quando sapere cœpisset. »> (20) On trouvera quelques autres maximes du même genre à la suite de la traduction des Caractères de Théophraste par M. Levesque, et dans l'intéressante préface de M. Coray. (21) Au rapport de Porphyrius dans la Vie de Plotin, chap. xxiv, les écrits de Théophraste furent mis en ordre par Andronicus de Rhodes. Diogène Laërce nous donne un catalogue de tous ses ouvrages, dont la plupart sont relatifs, ainsi que ceux qui nous restent, à différentes parties de l'histoire naturelle et de la physique générale. On trouvera dans le vol. x du Trésor grec de Gronovius un traité intéressant de Meursius sur ces ouvrages perdus. Cicéron dit (de Finibus, lib. V, cap. iv) qu'Aristote avait peint les mœurs, les usages et les institutions des peuples tant grecs que barbares, et que Théophraste avait de plus rassemblé leurs lois; que l'un et l'autre ont traité des qualités que doivent avoir les gouvernants, mais que le dernier avait en outre développé la marche des affaires dans une république, et enseigné comment il fallait se conduire dans les différentes circonstances qui peuvent se présenter. Le même auteur nous ap prend aussi que Théophraste avait, ainsi que son maître, une doctrine extérieure et une doctrine intérieure. (22) On désignait autrefois par ces mots les financiers ou traitants. (23) J'ai ajouté les mots pour parler, d'après l'édition de 1688; et on a fait en général dans cet ouvrage plusieurs corrections importantes sur les éditions imprimées du vivant de la Bruyère, qu'il était d'autant plus important de consulter, que la plupart des fautes de celles qui ont paru peu de temps après sa mort ont toujours été répétées depuis, et que plusieurs autres s'y sont jointes. Les notes mêmes de Coste et de M. B. de B. prouvent que ces éditeurs ne se sont servis que d'éditions du dix-huitième siècle; car les deux bonnes leçons du chapitre XI, qu'ils déclarent n'avoir mises dans le texte que par conjecture, existent dans les éditions du dix-septième, dont nous avons fait usage. (24) «< Tincam multa ridicule dicentem Granius obruebat, nescio quo << sapore vernaculo : ut ego jam non mirer illud Theophrasto accidisse << quod dicitur, cum percontaretur ex anicula quadam quanti aliquid << venderet; et respondisset illa atque addidisset, Hospes, non pote mi<< noris ; tulisse eum moleste se non effugere hospitis speciem, cum æta<< tem ageret Athenis optimeque loqueretur. Omnino, sicut opinor, in << nostris est quidam urbanorum sicut illic Atticorum sonus. » ( Brutus, cap. XLVI.) La Bruyère a peut-être en général un peu flatté le portrait d'Athènes; et quant à ce dernier trait, il en a fait une paraphrase assez étrange. Ce ne peut être que par quelque reste de son accent éolien, très-différent de celui du dialecte d'Athènes, que Théophraste fut reconnu pour étranger par une marchande d'herbes, sonus urbanorum, dit Cicéron. Posidippe, rival de Ménandre, reproche aux Athéniens comme une grande incivilité leur affectation de considérer l'accent et le langage d'Athènes comme le seul qu'il soit permis d'avoir et de parler, et de reprendre ou de tourner en ridicule les étrangers qui y manquaient. « L'at«<ticisme,» dit-il à cette occasion, dans un fragment cité par Dicéarque, ami de Théophraste, dont j'ai parlé plus haut, « est le langage « d'une des villes de la Grèce; l'hellénisme, celui des autres. » La première cause des particularités du dialecte d'Athènes se trouve dans l'histoire primitive de cette ville. D'après Hérodote et d'autres autorités, les hordes errantes appelées Hellènes, qui ont envahi presque toute la Grèce et lui ont donné leur nom, se sont fondues à Athènes dans les aborigènes Pélasges, civilisés par la colonie égyptienne de Cécrops. (25) L'on entend cette manière coupée dont Salomon a écrit ses Proverbes, et nullement les choses qui sont divines et hors de toule comparaison. (La Bruyère.) (26) Pascal. (27) Le duc de la Rochefoucauld. (28) Je croirais plutôt que ces défauts de liaison et d'unité dans quelques Caractères sont dus à l'abréviateur et aux copistes. C'est ainsi que les traits qui défigurent le chapitre XI appartiennent véritablement au chapitre xxx, découvert depuis la mort de la Bruyère, où ils se trouvent mêlés à d'autres trails du même genre, et sous le titre qui leur convient. (Je crois qu'il se trouve des transpositions semblables dans les chap. xix et xx. Voy. les notes 9 du chap. XIX, et 5 et 7 du chap. xx.) Du reste, j'ai proposé quelques titres et quelques définitions qui me semblent prévenir les inconvénients dont la Bruyère se plaint dans le passage auquel se rapporte cette note, et dans la phrase suivante. |