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l'œuvre mauvaise, deviendra Dieu; • tel est le secret qu'il faut cacher'. » Aussi, de même que les Brahmanes président à toutes les religions del'Inde, quelles que soient l'opposition, l'immoralité et l'absurdité de leurs doctrines, il est ordonné aux magistrats et aux chefs des États de les respecter toutes, et de protéger tous les cultes légalement établis. Quelque province que le chef de l'État réunisse ou < soumette à son autorité, après l'avoir conquise il rendra un culte au ‹ Dieu de ce pays (quelle qu'ait été << auparavant et quelle que soit encore « la religion du conquérant) : » c'est ce qu'on lit dans les Lois des Gentoux2 (Hindous). Les onze principaux Brahmanes qui ont travaillé à la rédaction de ce code, d'après vingt-deux auteurs et dix-huit ouvrages très-anciens, enseignent encore dans l'introduction doctrinale de cette œuvre législative, toujours en se conformant aux anciennes doc-❘ trines, que « Brahm créa d'abord Brah«ma et le chef des quatre castes fonda< mentales: il chargea ensuite Brahma « d'achever la création et lui confia le « gouvernement de tous les êtres (créés). « Brahma, suivant l'ordre qu'il en avait << reçu, produisit dans le monde (non< seulement) le reste de l'espèce hu« maine, la multitude infinie d'animaux, « de végétaux et d'êtres inanimés, (máis « encore) la piété et la morale, la justice et la continence, la concupiscence et la colère, l'avarice et la folie, l'arrogance et l'ivrognerie, › quoique ces six dernières productions soient regardées dans cette même introduction et dans ce code comme les plus grands vices, comme les vices capitaux qui sont la source de tous les autres. De plus, bien que dans ce même code la loi divine révélée soit solennellement proclamée comme le fondement essentiel et nécessaire de la religion, de la morale et de tout l'ordre social, c'est, néanmoins, « un article de foi (philoso< phique) que Dieu ne permettrait pas « un si grand nombre de religions s'il

• Oupnék'hat,, xxxvIII, no 158, p. 357. Item, L, no 177, p. 432.

• Code des Lois des Gentoux. Introd., p. 15 de la traduction française.

« n'avait du plaisir à contempler cette va<< riété. » C'est un fait attesté par tous les historiens modernes ', et cette croyance est d'ailleurs un résultat nécessaire des constitutions sociales dans l'Inde, conforme aux doctrines secrètes des Brahmanes primitifs, qui enseignent dans l'Oupnék'hat, ainsi que nous l'avons déjà « vu, que c'est Dieu même (Brahm) qui cest l'auteur et la cause productrice des < différentes sortes d'êtres,..... des di« verses espèces d'hommes, de croyan« ces, de religions; des sens et autres << facultés de l'âme humaine...... en un « mot, de la création et de la dissolu<tion du monde, qui n'est que sa forme « et sa figure 2. » Ainsi, l'indifférence dogmatique en matière de religion et de morale, et le panthéisme ou système de l'unité absolue de l'être, sont les seuls points fondamentaux sur lesquels les Brahmanes philosophes de la classe la plus élevée s'accordent réellement, et auxquels ils croient avec sincérité, depuis un très-grand nombre de siècles. En voici de nouvelles preuves.

Suivant le Manava-Dharma-Sastra, << la grande âme, l'âme suprême, Dieu, « de la substance de laquelle s'échap« pent (comme les étincelles du feu) ‹ d'innombrables principes vitaux, qui < communiquent sans cesse l'être, le « mouvement et la vie aux créatures ‹ des divers ordres, possède les trois «qualités, la bonté, la passion, l'obscu« rité, dont la prédominance détermine ‹ le caractère de ces créatures en y fai< sant prévaloir respectivement, l'une, ‹ la lumière, la vertu, la piété envers « Dieu; l'autre, la cupidité, l'ambition,

l'amour de la richesse; la troisième, « l'ignorance, le vice, l'athéisme ou « l'impiété, l'amour des plaisirs sen«suels, toutes les choses honteuses. › Dans le Çri-Bhagavata et plusieurs Pouranas, les Brahmanes décrivent ainsi sous le nom de Virata-Pouroucha (Homme-Dieu, Dieu-Homme, symbole

Préface du traducteur des Lois des Gentoux, P. 35. - L'abbé Dubois, Mœurs, institutions... de l'Inde, t. I, p. 416.

2 Oupnék'hat, 1v, no 82. Texte abrégé des pages 381-588.

3 L. XII, st. 15-24........ Le texte est encore abrégé, mais exact quant au sens et aux expressions.

du Dieu-Univers) l'Étre infini devenu univers, c'est-à-dire manifesté par la création : « L'univers entier est comme « le corps de la Divinité, qui en est < comme l'âme : la partie supérieure de << ses cuisses forme la terre; son nombril, le firmament;... les poils de son • corps sont les arbres, les gazons;... ‹ ses pieds, la prière et la conservation; ⚫ son anus, la mort, l'injure, l'enfer; « son dos, la violence, l'injustice, l'i« gnorance; son côté gauche et son dédain, l'ignorance, l'irréligion;... son « esprit et son sourire, la religion..... Tout ce qui compose ce visible univers « fait partie du Virata-Pouroucha (ou • Dieu-Univers). » ‹ Pour moi, dit « Brahma, poussé par le souverain Étre, ◄ la grande âme de l'univers, je crée ce « qui doit être créé. La bonté, la pas« sion, les ténèbres, sont les trois qua« lités de cet Étre, qui n'a réellement « pas de qualités, mais qui les revêt par « la puissance de sa Maya pour conser« ver, créer et détruire l'univers, c'està-dire les formes multiples de l'exis‹ tence qu'il revêtit par la seule force de l'illusion, et auxquelles il s'unit par le • seul effet de sa volonté indépendante. • Ces formes sont premièrement letemps, l'acte (ou l'activité), la disposition naturelle; d'où résultèrent respectivement, du temps, l'action réciproque des qua«lités (bonté, passion, ténèbres); de la < disposition naturelle, le changement; de l'acte (ou activité), la naissance ‹ du principe Mahat (intelligence): « tout cela sous la direction du même Esprit. De la transformation du prin•cipe Mahat, développé par les deux « qualités, la passion et la bonté, résulta « le principe appelé Ahankara (person⚫nalité), dans lequel dominent les ténè« bres (troisième qualité), et dont la < matière, la connaissance, l'action, ⚫ sont la substance même. Ce principe « (Ahankara, moi), en se transformant, < se manifeste sous une triple appa• rence, comme participant des qualités ‹ de la bonté, de la passion, des téněbres (d'où proviennent toutes les qualités bonnes ou mauvaises des créatures), et fut ainsi distingué comme • possédant l'énergie productive de la matière, de l'action et de la connais

<< sance. La divinité, la spiritualité, la « matérialité, ces trois attributs sont « l'ètre suprême *. »

Tel est le Dieu auquel, selon les Brahmanes, nous devons rendre nos adorations et nos hommages. Il n'y en a point d'autres que LUI, et Il est l'Étre unique, universel, hors duquel il n'y a rien; et le souverain bonheur comme la suprême perfection consiste à reconnaître par toutes les facultés de l'âme cette grande vérité : BRAHM EST LE SEUL ÈTRE. « La « forme (qu'on lui attribue quand on le ‹ représente) se livrant aux actes de la ‹ création, de la conservation et de la ‹ destruction de l'univers, on ne la lui

La

attribue que pour nier qu'il soit actif, « puisqu'elle est uniquement le produit « de Maya (l'illusion). » « L'origine de l'univers n'est pas hors de là. « vertu et le vice, l'ignorance et la « science, les biens et les maux de « l'existence présente, n'ont pas d'au«tre origine, puisque cet Étre suprême, ‹ universel, unique, est tout à fait sans < distinction, ni attribut, ni qualité, « quoiqu'il paraisse en avoir *. » Et la perfection comme le bonheur consistent pour l'homme à être dans la même indifférence que le Créateur, par rapport à toutes les choses de ce monde qui n'est qu'illusion; car, « cet Étre ‹ (le Dieu nature et humanité), qui est « l'âme de l'univers, voit tout avec la « même indifférence, est affranchi de < la dualité (et de la multiplicité), de « l'égoïsme et de toute passion, (et) < remplit (néanmoins) ces divers rôles « sans que l'égalité de ses sentiments « en soit jamais altérée. » Pourvu qu'il continue de jouir des priviléges inhérents à sa caste, le Brahmane voit avec la même indifférence que l'être suprême le polythéisme, la diversité des

• Traduction du Bhagavata-Purdna, ch. v; VI, p. 119,... par M. Eugène Burnouf, t. I, in-40. Comparer à cette description du Dieu-Univers, une autre description qui se trouve dans l'Oupnék'hat, III, n° 71, t. I, p. 329-539, et dont la conclusion, déjà citée, est : « Toute production, bonne ou mauvaise, vient de Lui (de l'Étre suprême et unique). >>>

Bhagavata-Purana, 1. II, ch. x, p. 151 de la traduction française, par M. Eugène Burnous, l. III, ch. VII-IX.

3 Bhagavata-Purana, 1. 111, passim. Oupnék'hat, passim.

structif; nous ne pouvons lui donner ici toute l'étendue convenable. Au fond, quelques propositions suffiront peutêtre pour l'établir.

religions, la dépravation des mœurs, l'abrutissement des peuples soumis à sa domination, les divers systèmes de philosophie. La caste des Brahmanes préside à tous les cultes, même aux Spinosa enseigne le panthéisme le cultes polythéistes formellement con- | plus rigoureux. Selon lui, il n'y a

damnés par les Védas ; c'est dans son sein que se sont formées les diverses écoles philosophiques les plus opposées; les Brahmanes se trouvent même dans ces orgies affreuses, où l'égalité absolue de tous les hommes, quelle que soit leur caste, est proclamée et célébrée par les plus honteux excès de la débauche, pendant lesquels toutes les femmes sont communes '. En un mot, partagés sur tout le reste, les Brahmanes ne sont d'accord que sur un point, savoir le panthéisme et l'indifférentisme. Deux doctrines seulement n'ont pu trouver grâce à leurs yeux : 1o le Bouddhisme, parce qu'il nie l'institution divine de la caste des Brahmanes, et qu'il leur refuse le pouvoir exclusif qu'ils s'arrogent d'enseigner la science sacrée, pour attribuer ce droit à tout homme de quelque caste qu'il soit, pourvu qu'il en soit capable; 2o l'athéisme, d'abord, parce qu'en ruinant la religion il ruinerait par là même tous leurs priviléges politiques; ensuite, parce que ces sages superbes qui ne croient à rien pensent néanmoins que la religion et la morale sont encore nécessaires pour le peuple. De sorte que pour les Brahmanes initiés à la haute science, la vie humaine ne saurait être qu'un calcul d'intérêts et de jouissances sagement combinées, et la politique qu'un équilibre de forces opposées personnifiées dans les individus, dans les corps de nation, dans les diverses classes de la société et dans les différents systèmes religieux et philosophiques.

,

qu'une seule substance, qui possède à la fois toutes les perfections de la nature divine, de l'esprit et de la matière : cette substance est la substance de tout ce qui existe, et elle s'appelle Dieu. Dieu étant l'être nécessaire, il n'y a rien de contingent dans la nature des êtres; toutes choses sont au contraire déterminées par la nécessité de la nature divine, à exister et à agir d'une manière donnée, et ne peuvent exister ni agir d'une autre manière ni dans un autre ordre; car Dieu qui produit tout de sa substance, n'agit pas en vertu d'une volonté libre, mais en vertu de la nécessité de sa nature. Mais comme Dieu est infiniment parfait, il s'ensuit que tout ce qui est ou a été a dù être et n'aurait pu être autrement; que tout est divin et par conséquent pour le mieux, et que le bien et le mal, le mérite et le péché, la louange et le blâme, l'ordre et la confusion, la beauté et la laideur, la liberté et la contrainte, et autres choses semblables, sont des fruits de l'imagination et non de la raison, des préjugés dont il faut débarrasser l'esprit humain. L'âme et le corps, dont l'essence est la pensée et l'étendue, ne sont, comme tous les autres êtres, avec leurs affections et leurs modifications, que des idées divines, des formes particulières de l'Étre absolu. Suivant cette théorie, nous n'agissons et nous ne pensons, quelles que soient nos actions et nos pensées, que par la volonté de Dieu, nous participons de la nature divine; toutes choses résultent de l'éternel décret de Dieu avec une absolue nécessité; l'âme n'est qu'un automate spirituel : les impies eux-mêmes expri

Plus d'un lecteur, en lisant ces lignes, va, sans doute, se croire déjà en plein 17o, 18e et 19° siècle. Un rapproche-ment à leur manière la volonté et les et les perfections divines. D'où il ré- | autocratie absolue sur l'éducation, la

ment entre l'antique philosophie des Brahmanes et la philosophie moderne, telle qu'elle se développe en dehors du catholicisme, serait aussi curieux qu'in

• Voyez l'abbé Dubois, Mœurs, institutions... de Pinde, t. I, p. 396...

pensées divines. Les bons et les méchants, formés de la substance divine, comme de la même masse d'argile on fait des vases purs et impurs, agissent également d'une manière conforme à l'ordre éternel des desseins de Dieu, et manifestent, à leur façon, les attributs

sulte: 1o que la loi de l'homme et son droit, c'est sa conservation à tout prix; qu'il a droit à tout ce qu'il peut embrasser, que ce droit il le tient de la nature, c'est-à-dire de Dieu même, et qu'en ce sens toute action, même la plus | violente et la plus criminelle, est légitime; 2o que la religion, la morale, les doctrines sociales et philosophiques n'ont aucune valeur intrinsèque et absolue, et sont entièrement libres pour chaque individu et relatives à leur nature, à leur volonté, à leurs inclinations; 3o que tout cela est affaire de pratique, d'intérêt et d'utilité publique, que l'État doit régler souverainement, en vue de sa paix et de sa tranquillité propres, décrétant à son gré ce qu'on doit regarder comme sacré ou profane, juste ou injuste, religieux ou impie, bien ou mal, d'après ses principes philosophiques et l'intérêt de sa conservation; 4o que le pacte social et l'autorité du souverain ne peuvent être maintenus que par la force et le supplice; que cette autorité doit être absolue sur la religion, la morale, les affaires civiles, la vie et la liberté des citoyens; et que l'État doit regarder comme ennemis et envoyer à la mort, pour les causes les plus légères, ceux qui ne partagent pas sans restrictions ses sentiments 1.

Tout le monde sait que tels sont les principes que l'on cherche encore à faire prévaloir dans tous les gouvernements, et particulièrement en France. L'école dont nous voulons parler, ayant souvent fait l'éloge de Spinosa et de ses doctrines, n'ayant souvent fait que les répéter, quelques citations suffiront pour établir notre assertion.

D'abord, les prétentions de l'État à une

religion, les mœurs, qu'il administre et salarie, au même titre et de la même manière queles bagnes, les hospices, les grands chemins et les théâtres, ne sont que trop bien connues de tout le monde. Ceci n'est pas un simple résultat de l'ambition, mais un produit direct du panthéisme, de l'indifférentisme, et du scepticisme, qui sont, du reste, les seules doctrines philosophiques sur lesquelles on soit un peu d'accord, dans l'école dont nous voulons parler. Selon M. Cousin, Dieu crée: il tire le « monde non du néant, qui n'est pas, mais de lui, qui est l'existence abso«lue..... La création est nécessaire « (éternelle...); il y a plus: Dieu crée « avec lui-même; donc il crée avec tous ‹ les caractères que nous lui avons reconnus, et qui passent nécessaire«ment dans ses créations. Car « Dieu crée sans cesse et infiniment. » Donc « le Dieu de la conscience n'est pas un Dieu abstrait,.... c'est un Dieu ‹ à la fois vrai et réel, à la fois substance et cause,... c'est-à-dire étant

cause absolue, un et plusieurs, éter• nité et temps, espace et nombre, es« sence et vie, indivisibilité et totalité, « principe, fin et milieu, au sommet de « l'être et à son plus humble degré, infini « et fini tout ensemble, triple enfin, c'est« à-dire à la fois Dieu, nature et huma« nité. Et ailleurs, ‹ Dieu est à la fois « infini et fini, et rapport du fini à l'infini. « En effet, si Dieu n'est pas tout cela, il n'est rien'. Il n'est pas étonnant que le Manuel universitaire de philosophie, approuvé par le conseil royal, enseigne que les pratiques religieuses, sous quelque forme qu'elles apparaissent, « sont l'expression, plus ou << moins parfaite, mais toujours légitime, ‹ son infinie activité 1. Ni les hommes ni | sisme et le brahmanisme sous les divers

Extraits textuels de Spinosa. Les efforts de ce philosophe pour déduire de ces principes une morale pure, ne sauraient en corriger le vice fondamental, et ne peuvent être qu'une suite de contradictions, puisque ces principes impliquent direc tement l'apothéose de toutes les religions, de toutes les erreurs et de tous les crimes, et qu'ils reposent eux-mêmes sur un principe supérieur, qui est la panthéification de toutes choses. - Le spinosisme rappelle naturellement à l'esprit le saintsimonisme et l'éclectisme: nous dirons seulement un mot de ce dernier.

d'un des besoins les plus impérieux «*du cœur humain 2. Notre âme n'est que ‹ Dieu lui-même prenant conscience. « L'homme et le monde sont de même < souche, et Dieu, leur père commun, n'a fait, en leur donnant l'être, que « mettre sous des formes diversifiées,

Cousin, Histoire de la Philosophie. Introduction. leçon ve. Fragments philosophiques. Préface.

* P. 137.

les siècles ne sont pas plus coupables de leurs opinions que de leurs erreurs; car, toute opinion est aussi

points de vue que nous avons signalés. Tout le monde connaît d'ailleurs les vains efforts de M. Cousin et de l'Uni

• nécessairement fausse qu'elle est né-versité pour se disculper des accusa

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tions de panthéisme et d'indifférentisme en matière de religion, de morale et même de doctrine philosophique, qui leur ont été souvent adressées depuis un certain nombre d'années.

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COURS DE PHILOSOPHIE.

CHAPITRE SIXIÈME '.

Comment la connaissance des vérités premières parvient-elle à l'homme ?

Avant de travailler sur les vérités premières, et de reconstruire sur cette base l'édifice des connaissances humaines, le philosophe se demande comment il a connu ces vérités, sur quel fondement repose leur certitude.

Un fait est évident pour lui: c'est qu'il ne doit pas ces matériaux au travail de son esprit, il les a reçus.

Comment lui ont-ils été donnés? Sontils du même genre?

Pour peu qu'il considère les vérités premières, il reconnait aussitôt qu'elles ne sont pas toutes du même genre.

Les unes existent dans le sujet même qui pense, et sont internes ou subjectives.

Les autres existent hors de ce sujet, et sont externes ou objectives *.

La première catégorie se compose de tout ce qui occupe l'esprit quand il pense.

Quelques auteurs, Locke, par exemple, désignent cette espèce de vérités parle nom générique d'idées. Cette expression expose à confondre des choses qui doivent être distinguées. L'intel

Voir le ch. y au numéro précéd. ci-dess., p. 98. 2 Reid, Essai, 1, ch. 1, t. III, p. 22. * Locke, Essai sur l'Entendement.

ligence, servie par les organes corporels, reçoit les impressions des objets matériels qui frappent les sens.

Elle éprouve les sensations de douleur ou de plaisir produites par les organes des sens, par le contact des corps extérieurs, ou qu'une partie du corps peut produire sur l'autre partie.

A la suite des impressions produites par les objets matériels se forment des images ou représentations mentales conformes à ces objets; je vois un cheval, un arbre, une maison, même en l'absence de ces objets, je me représente ou me figure intérieurement le cheval, l'arbre ou la maison.

L'intelligence conçoit les idées d'objets intellectuels qui ne tombent pas sous les sens; par exemple, les idées d'ordre, de justice, de devoir, de cause, de pouvoir: c'est dans ce sens que nous prendrons le mot idée.

Enfin, l'intelligence compare les images des objets corporels, les idées des objets intellectuels; elle voit leur convenance ou leur opposition immédiatement sans le secours d'une troisième image ou idée, elle juge '.

Telle est la nomenclature des connaissances internes ou subjectives. Les connaissances externes ou objectives sont aussi de deux espèces.

Ce sont d'abord les objets qui ne tombent pas sous les sens, l'ordre, la

De Bonald, Recherches, t. I, p. 540.

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