aussi un jour remarquable par l'entrée du souverain Pontife dans notre ville, et par l'enthousiasme qu'elle a produit. Nos souverains et la ville entière s'étoient préparés à faire au saint Père la réception la plus honorable. Le comte Forni, chambellan et conseiller de S. A. R., fut envoyé au-devant de lui pour le complimenter. M. l'évêque de Modène se rendit pour le même objet à Citta-Nuova. Les troupes défilèrent par la porte SaintAugustin, et deux carrosses de cour furent envoyés pour le Pape et les principales personnes de sa suite. Le duc lui-même voulut aller à cheval au-devant de S. S., et partit accompagné de la garde d'honneur. Les autorités de la ville, les ministres et la noblesse s'avancèrent sur la ronte par laquelle devoit arriver le saint. Père. Une société de jeunes Modénois avoit élevé en peu de jours une machine mobile, sur laquelle étoit une statue colossale de la religion foulant aux pieds un dragon, et portant d'une main la croix et de l'autre les ta bles de la loi. Cette machine fut établie sur la place Saint-Augustin, et y attendit l'arrivée du saint Père, qui fit son entrée dans le carrosse de cour, et se rendit à la cathédrale, où il fut reçu suivant le rit du pontifical romain. On chanta l'antienne Tu es Petrus, qui fut suivie du Tantum ergo, et de la bénédiction du SaintSacrement donnée par M. Fabriani, vicaire - général. S. S. se rendit ensuite au palais, au milieu des acclamations et des transports de joie d'une foule nombreuse. Elle y avoit été précédée par notre souverain, qui accourut avec la princesse son épouse au-devant du souverain Pontife. Ils le trouvèrent sur l'escalier, et se prosternèrent à ses pieds. S. S. se hâta de les relever, et monta dans les appartemens suivie de toute la cour. Elle parut sur le balcon, et donna sa bénédiction au peuple. Elle reçut ensuite les députations, et particulièrement l'évêque. Le soir, il y eut une illumination avec beaucoup d'mscriptions diverses. Le saint Père étoit accompagué des cardinaux Pacca et Caselli, et des prélats Bertazzoli, Menocchio, Doria, Testa, Sala, Mauri, Zamboni, Cristaldi, Prela, Bacili, etc. Le jour suivant, jour de la Fête-Dieu, Sa Sainteté dit de bonne heure la messe dans la chapelle royale en présence du duc, de la duchesse, de la noblesse, et de tous ceux que le lieu put contenir. Elle entendit ensuite la messe d'actions de grâces. A neuf heures, toute la cour se rendit à la cathédrale, et pen après S. S. y arriva aussi. La pluie avoit d'abord fait craindre que la procession ne put avoir lieu; mais le temps étant devenu un peu plus serein permit de mettre à cette cérémonie toute la pompe qu'elle méritoit. Les confréries, le clergé des paroisses, la noblesse, le chapitre, les archevêques d'Edesse et de Philippes, précédoient le dais sous lequel M. l'évêque portoit le Saint-Sacrement. Immédiatement après venoit le souverain Pontife, qui tenoit en main un livre de prières, et attiroit tous les regards par son recueilment et sa piété. Il étoit suivi des deux cardinaux et des prélats de sa cour, puis du duc François IV, de la duchesse et de toute leur cour. La procession terminée, S. S. retourna au palais, où nos souverains, toujours attentifs à rendre au saint Père toute sorte d'honneur, l'attendoient. S. S. après avoir donné sa bénédiction du haut du balcon, reçut les députations des - chapitres de Bologne, de Ferrare, de Ravenne et de Mantoue, la société de Saint-Ignace, la garde d'hon-, neur, et différens corps. Elle dîna avec nos souverains, et visita le monastère de la Visitation, qui est contigu au palais, et qui avoit échappé seul à la destruction des communautés religieuses. Le soir, le souverain Pontife donna encore la bénédiction à plus de 15,000 personnes réunies sur la place, et qui faisoient retentir l'air d'applaudissemens, pendant que des enfans, placés sur la machine dont nous avons parlé, jetoient des fleurs. Une sociéte de gentilshommes ajouta à la joie de cette journée en faisant faire une distribution aux pauvres. Le vendredi 26, S. S. dit encore la messe dans la chapelle royale, et le duc et la duchesse y assistèrent. Ensuite un grand nombre de corps et de particuliers furent admis au baisement des pieds. Le Pape, après avoir donné sa bénédiction au peuple, visita la bibliothèque d'Est avec LL. AA. Les bibliothécaires, MM. Lombaldi et Baraldi, eurent l'honneur de lui en faire remarquer les principales richesses. Il fit ensuite une promenade dans le jardin du palais avec le duc et la duchesse, et reçut beaucoup d'étrangers qui étoient venus d'Imola, de Mantoue, de Vérone. Il vit entr'autres le comte Grégoire Chiaramonti, son frère, et la comtesse ChiaramontiGaddi, sa nièce. Le samedi 27 mai, le religieux Pontife dit la messe qu'entendirent nos princes. Il donna sa dernière bénédiction au peuple, et après avoir pris son repas et fait ses adieux au duc et à la duchesse, il descendit du palais pour monter en voiture. Il trouva sur l'escalier ces pieux souverains qui, avec toute la cour, l'attendoient pour lui donner un nouveau témoignage de dévouement. Ils se jetèrent à ses pieds. S. S. les releva, les bénit, et partit pénétrée des attentions, des égards et des respects de ces augustes personnages. La foule du peuple avoit redoublé, et faisoit retentir l'air de cris. Une escorte d'honneur accompagnoit la voiture. Le Pape bénit plusieurs fois la multitude, et prit le chemin de la porte Saint-François. Le duc voulut jouir encore de la présence du saint Père. Il monta à cheval, et par des chemins détournés il arriva à Formigine, à sept milles de Modène, où il causa une grande surprise à l'auguste voyageur. Ils s'entretinrent encore ensemble, et S. S. reçut les hommages du peuple de ce lieu, de beaucoup d'étrangers des environs, et des personnes qui étoient encore venues de Modène pour le voir. Elle ne se sépara point du prince sans lui témoigner son estime et sa sensibilité pour un accueil si obligeant, et pour des soins si empressés, et en quittant les Etats de la maison d'Est, elle s'écria plusieurs fois : Ah! les bons princes. Ces nobles héritiers de deux grandes maisons lui avoient 3 1 し en effet prodigué de rares témoignages de respect et de dévouement. Ils se sont honorés eux-mêmes par les honneurs qu'ils ont rendus au chef de l'Eglise, et cet exemple de piété ne sert qu'à les rendre plus chers à leurs peuples, qui ont aussi manifesté tant d'attachement et de vénération pour le vicaire de Jésus-Christ, et qui, joignant leurs vœux pour sa personne et pour celles de leurs souverains, se félicitent de voir Rome et Modène rendues à leurs maîtres, et espèrent des jours plus heureux pour l'Eglise et pour l'Etat sous des gouvernemens légitimes et paternels. NOUVELLES POLITIQUES. PARIS. Le 30 août, l'empereur d'Autriche a fait une visite au Ror. S. M. I. étoit accompagnée du prince hériditaire, son fils, et de l'archiduc Louis, son frère, qui viennent l'un et l'autre d'arriver à Paris. - Les trois souverains alliés et les princes de leur maison doivent partir vers le 10 septembre pour se rendre à Vertus, en Champagne, où ils passeront une grande revue de l'armée russe. De là ils iront à Dijon où il y aura également une grande revue de l'armée autrichienne. L'empereur d'Autriche partira de là pour Milan, où l'on fait des préparatifs pour son couronnement comme roi de Lombardie. On croit que l'empereur de Russie y assistera. Ainsi il ne paroît pas que les souverains aient le projet de revenir à Paris. La garde royale de Prusse a, dit-on, reçu des ordres pour se disposer à partir, et l'on s'attend à voir publier sous peu de jours une note officielle sur ce point et sur plusieurs autres. -Mr. le duc d'Angoulême, que quelques journaux avoient fait revenir à Paris, il y a trois jours, est parti, le 26, de Bordeaux pour Toulouse, immédiatement après la clôture des séances du collége électoral. Le but de ce voyage précipité est d'arrêter la marche des troupes espagnoles que l'on supposoit se disposer à entrer en France. On espère tout de l'intervention d'un prince qui s'est fait aussi connoître en Espaene par ses belles qualités, et à qui le midi a déjà tant d'obligations. - Un journal du soir annonçoit, et les crieurs répandoient dans les rues la nouvelle de la mort de Buonaparte. Ce bruit, répandu par un journal anglois, est démenti par les autres, et n'a aucun fondement. - Dimanche dernier, 27 du courant, S. A. S. Mme. la duchesse douairière d'Orléans se rendit à l'église de l'hospice royal des Quinze-Vingts, pour y entendre la messe en musique et le Te Deum que les aveugles de cet hospice exécutoient pour la fête de saint Louis leur glorieux fondateur. A la sortie de l'église, S. A. S. fut complimentée par M. le curé de la paroisse; elle daigna ensuite venir se reposer dans l'une des salles de l'administration, dans laquelle MM. les gouverneurs-administrateurs, les employés, et un grand nombre d'aveugles furent présentés à S. A. S. Mme, la duchesse d'Orléans adressa à chacun, selon sa position, des paroles de bonté, la plus douce récompense des soins accordés aux infortunés, et pour ceux-ci la plus touchante consolation dans leurs peines. S. A. S. s'est retirée comblée des bénédictions des aveugles. Les cris de Vive le Roi! vivent les Bourbons! vive Mme, la duchesse d'Orléans! se sont fait entendre à son départ comme à son arrivée; ils n'ont cessé d'étre répétés toute la soirée. Les chants et les jeux, qui avoient en lieu le 25 à l'hospice, ont ausi terminé la journée du 27. Et de cette manière, les aveugles reconnoissans out célébré durant trois jours la fête du Ror leur auguste bienfaiteur. Une longue ordonnance du Roi, du 30 août, détermine le mode de formation de 47 régimens de cavalerie. 1 Une autre ordonnance porte que le maréchal Moncey est destitué, et subira un emprisonnement de trois mois, pour avoir refusé, sans excuse valable, de présider le conseil de guerre qui doit juger le maréchal Ney. Il paroît un mémoire en faveur de ce dernier, par un avocat. L'auteur n'essaie pas de justifier entièrement l'accusé. Il prétend seulement qu'à l'époque où celui-ci passa à Buonaparte, ses soldats avoient déjà pris le même parti, et que sa défection n'a point servi les vues de l'empereur, dont la troupe étoit déjà grossie. Ainsi il convient de la faute, et ne cherche qu'à l'atténuer. Le conseil de guerre jugera de quelle valeur est cette défense. |