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MÉMOIRES pour servir à l'Histoire ecclésiastique pen dant le 18. siècle. Seconde édition, considérablement augmentée (1).

SECOND ARTICLE.

Le récit de la naissance et des progrès de l'incrédulité, quoiqu'il tienne une grande place dans l'histoire ecclésiastique du dernier siècle, n'est cependant qu'une partie des événemens et des faits qui ont rempli cette époque, et mille autres objets, qui ne sont pas non plus sans importance et sans intérêt, s'offrent et à la plume de l'écrivain, et à l'attention du lecteur. Les controverses générales ou particulières suscitées dans l'Eglise, leurs causes et leurs suites, la succession des papes et les principaux actes émanés de leur autorité, les conciles tenus en

(1) Cet ouvrage sera composé de quatre gros volumes in-8°., beaux caractères et très-beau papier; prix, 30 fr. pris à Paris, et 39 fr. franc de port par la poste, chez Adrien Le Clere, imprimeurlibraire, quai des Augustins, no. 35, et non chez aucun autre libraire

de Paris

Cet ouvrage fut proposé l'année dernière par souscription, et le nombre des souscripteurs a surpassé notre espérance. Le prix actuel n'est pas celui annoncé par notre prospectus: nous ne voulons pas y déroger envers nos souscripteurs; seulement nous engageons ceux qui désireroient avoir les deux volumes qui paroissent, de vouloir bien les faire retirer, ou de nous indiquer par quelle voie ils veulent les recevoir, et de nous solder le prix des quatre volumes.

L'augmentation du prix est fondé sur ce que les volumes sont beaucoup plus considérables que nous ne l'avions pensé, à cause de la quantité de matières qu'ils contiennent.

La souscription est fermée depuis cinq mois.

(Note de l' Imprimeur.)

Tome V. L'Ami de la R. et du R. No. 112. H

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divers lieux, les affaires les plus remarquables des églises particulières, les écrits et les démarches des évêques, les rapports de l'autorité ecclésiastique avec la puissance civile, la protection ou les envahissemens de celle-ci, les erreurs qui se sont élevées, les partis qui se sont formés et ce qui a été fait pour les réduire, les missions, la vie des personnes distinguées par leur sainteté, les ouvrages qui ont eu le plus d'influence soit en bien, soit en mal, enfin tout ce qui se lie à l'histoire de la religion dans les quatre parties du monde, ses succès comme ses malheurs, ses consolations comme ses sujets de deuil, voilà l'abondante matière que l'écrivain a à traiter, et qui, par la multitude, la variété et l'importance des détails, doit exciter la curiosité de tous ceux qui aiment l'Eglise. Que seroit-ce si on joint à tant de faits si divers et si nombreux le récit d'une révolution si féconde en événemens, et qui a enfanté tant de changemens, d'erreurs et de crimes? L'bistoire seule de cette grande secousse qui a ébranlé vingt Etats, et qui a mis l'Eglise à deux doigts de sa ruine, pourroit produire des volumes, et l'écrivain qui veut la raconter aura plutôt à craindre de trop s'étendre que de manquer de matière.

Telle étoit donc la série de faits qui s'offroit aux recherches de l'auteur des Mémoires, et dans laquelle il avoit à choisir ceux qui devoient entrer dans son plan. Lorsqu'il publia pour la première fois son ouvrage en 1806, il s'étoit beaucoup restreint, ou peut-être manquoit-il alors de plusieurs matériaux. Il avoit omis quelques événemens, il en avoit effleuré d'autres. II avoit peu parlé des églises étrangères, et il avoit averti lui-même de ce qui

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manquoit sous ce rapport à son travail. D'ailleurs il écrivoit dans des temps peu encourageans pour un historien. Quoique son livre n'eût été proprement soumis à aucune censure, il avoit été obligé à une extrême réserve sur quelques points. On ne faisoit que sortir d'une persécution longue et atroce, et on étoit près d'en voir recommencer une autre sourde, mais active. La religion étoit fortement comprimée par un homme qui ne la vouloit que comme un des moyens de sa politique, qui ne la toléroit que sous ce rapport, et aux yeux duquel c'étoit un crime de la servir dans d'autres vues que celles qu'il avoit lui-même. Sous un tel gouvernement, l'auteur des Mémoires n'eut point à se reprocher d'avoir dit ce qu'il ne pensoit pas; mais il ne put dire tout ce qu'il pensoit. Il lui fut impossible de s'étendre sur certains faits, et si l'on ne trouve dans son ouvrage ni contrevérités, ni flatteries, on put y remarquer du moins des omissions et des lacunes.

Devenu plus libre aujourd'hui, il a pu donner plus de développement à des récits importans, et son ouvrage a dû y gagner sous beaucoup de rapports. Il paroît avoir fait de nouvelles recherches, et s'être procuré de nouvelles lumières. Aussi ses Mémoires sont plus que le double de ce qu'ils étoient dans l'origine. La première édition étoit en deux volumes ordinaires. Celle-ci sera de quatre gros volumes. L'auteur rend compte de ces augmentations dans sa préface, et nous les avions annoncées dans le prospectus que nous insérâmes il y a un an dans ce Journal. La plus saillante de ces augmentations dans les volumes qui nous occupent aujourd'hui, est une Introduction sur l'état de la religion et de l'Eglise au commencement du 18. siècle. L'auteur y passe en revue toutes les parties de la chrétienté, et il en donne la situation sous le rapport de la piété, des sciences ecclésiastiques et de l'ordre religieux et moral. Les morceaux consacrés à chaque pays sont pleins de développemens curieux quoiqu'assez inégaux en étendue, et l'on pourroit trouver par exemple que celui sur l'Italie est un peu court relativement aux autres. Il semble que cette importante portion de la catholicité auroit pu fournir un article plus détaillé et plus nourri, s'il n'étoit vraisemblable que cette briéveté tient au défaut de renseignemens suffisans. Les articles qui nous ont paru traités avec le plus de soin, sont ceux de la France, de l'Angleterre et des missions. Nous citerons dans le premier de ces articles le passage suivant, qui est propre à donner à la fois une idée de l'esprit de l'auteur, de ses jugemens et de son style, et qui nous paroît faire bien connoître Louis XIV, et la fin de son règne sous le rapport religieux.

« Le souverain donnoit lui-même l'exemple. II étoit régulier, et il vouloit que sa cour le fût. Il avoit renoncé depuis long-temps à ces attachemens coupables dans lesquels sa jeunesse s'étoit égarée, et dont les objets s'étoient condamnés aux larmes du repentir et aux expiations de la pénitence. Mme, de la Vallière et Mme. de Montespan vivoient encore, mais vivoient dans la retraite et dans les pratiques de la piété. La première avoit embrassé les austéri:tés du Carmel, et les soutenoit avec courage. La seconde n'avoit pas fait de vœux, mais demeuroit dans une communauté où elle s'étoit donnée toute entière à Dieu et aux pauvres. L'une et l'autre étoient un grand exemple pour le monde qui avoit

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été témoin de leurs scandales, et qui apprenoit parlà le moyen de les expier. Louis XIV ne se contentoit pas de s'être détaché des liens de ses passions. It faisoit respecter la vertu. Il n'eût souffert ni les éclats du vice ni les railleries contre la religion. 11 avoit toujours révéré celle-ci dans le temps de ses plus grands écarts; à plus forte raison quand elle avoit repris sur lui tout son empire. Il vouloit qu'elle fût honorée, et il se faisoit gloire d'y contribuer. L'attention la plus scrupulense présidoit à ses choix pour les bénéfices. Ce choix étoit à ses yeux un acte de religion. Il le réservoit pour les plus grandes fêtes de l'année, pour les jours qu'il consacroit aux exercices de piété et à la participation des mystères saints. Dans les places, il préféroit ceux qui paroissoient plus religieux. Je sais qu'on lui a reproché d'avoir par-là favorisé l'hypocrisie, et d'avoir fait de mauvais choix. Sans doute Louis a pu se tromper, il n'étoit point infaillible. Mais des choix plus heureux devroient lui obtenir grâce pour quelques autres qu'on lui a bien durement reprochés. Quant à l'hypocrisie qu'on l'accuse d'avoir encouragée, cette imputation ne nous paroît nullement fondée. Si, sous un prince vertueux, ceux qui ne le sont pas feignent de l'être pour lui faire la cour, est-ce à lui ou à eux qu'il faut adresser des reproches? L'abus que les courtisans font des qualités du prince, doit-il faire condamner ces qualités, et parce qu'on le trompe fant-il absolument qu'il ait tort?

>> Louis XIV étoit sincèrement religieux; il l'étoit par conviction et par sentiment. Il honoroit les ministres de l'Eglise. On a plusieurs de ses lettres aux papes de son temps. Elles sont remplies d'ex

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