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science rigoureuse, aux lois de laquelle devaient se plier tous les phénomènes physiques.

Or ceci ne s'est pas vérifié pendant longtemps des savants éminents se sont efforcés de donner une explication mécanique des phénomènes optiques et électromagnétiques (1); ils n'ont pas abouti.

La cause profonde de cet échec a été mise en pleine lumière par Einstein: la mécanique classique n'est pas compatible avec les lois de l'electromagnétisme, car celles-ci impliquent d'autres notions de l'espace et du temps. Il a fallu choisir, et le choix s'est trouvé imposé par la rigueur avec laquelle les lois de l'électromagnétisme ont été vérifiées dans des expériences d'une extraordinaire précision. Ce n'est pas l'électromagnétisme qu'il faut plier aux lois de l'ancienne mécanique; c'est au contraire la mécanique qui doit être remaniée de façon à être rendue compatible avec les lois de l'électromagnétisme : l'accord ne peut être fait qu'en renonçant à la mécanique classique, et aux notions d'espace absolu et de temps absolu dont elle dérive; l'accord n'est obtenu qu'en abandonnant d'une façon définitive la fiction des actions instantanées à distance, et en donnant son plein développement au point de vue opposé, celui des actions de proche en proche avec vitesse finie. La

(1) Nous savons depuis Maxwell, que l'Optique est une branche de l'électromagnétisme; entre la lumière et les ondes de T. S. F., la seule différence est dans la durée de la période, de même que pour le son il y a des sons aigus et des sons graves.

théorie d'Einstein est le prolongement nécessaire et le couronnement de la théorie électromagnétique de Faraday, de Maxwell et de Lorentz.

L'espace et le temps ne sont ni absolus ni indépendants: seul un mode d'union de l'espace et du temps possède une individualité, une réalité physique et constitue un Univers ou Espace-Temps à quatre dimensions (ce qui est le langage le plus commode pour exprimer qu'il faut quatre coordonnées, trois d'espace et une de temps, pour repérer un événement). On peut dire encore que chaque observateur décompose l'ensemble des événements en «< espace » et en « temps », et que deux observateurs en mouvement l'un par rapport à l'autre font deux décompositions différentes.

Les notions d'espace relatif et de temps relatif conduisent à une cinématique nouvelle, où la vitesse de la lumière apparaît comme la limite supérieure de la vitesse d'une portion de matière ou d'un signal. A cette cinématique est liée une dynamique dans laquelle il n'y a plus de masse invariable caractérisant une portion déterminée de matière; la masse mesurée par un observateur croit indéfiniment à mesure que la vitesse de la portion de matière tend vers la vitesse de la lumière.

De plus, et ceci est capital, la masse s'identifie avec l'énergie. Enfin les trois principes de conservation de l'ancienne dynamique conservation de la masse d'un système matériel, conservation de l'énergie, conservation de la quantité de mouvement se trouvent, par la puissance de simplifica

tion de la théorie nouvelle, fusionnés en un principe unique.

Tels sont les bases et les résultats essentiels de la première étape du développement de la théorie d'Einstein: la relativité restreinte aux mouvements en ligne droite et à vitesse constante. L'expérience est venue vérifier les conséquences: la masse des électrons croît avec la vitesse suivant la loi prévue, et il est prouvé aujourd'hui que la dynamique de la relativité explique qualitativement et quantitativement la structure complexe des raies spectrales (travaux de M. Sommerfeld).

Il convient toutefois de noter que, tant qu'il ne s'agit pas de mobiles animés de vitesses fantastiques, les formules de l'ancienne mécanique restent applicables au point de vue pratique. L'ancienne mécanique, bien que basée sur des idées inexactes, reste dans la plupart des cas une excellente approximation.

La théorie de la relativité restreinte doit son succès à la suppression d'axiomes à priori, de restrictions inutiles telles que le temps absolu, l'espace absolu, la masse absolue. Un pas de plus conduit à la relativité généralisée et à la théorie de la gravitation.

Pourquoi restreindre la théorie aux systèmes en mouvement rectiligne et uniforme ? les lois générales de la nature doivent pouvoir s'exprimer sous une forme intrinsèque indépendante de tout

système de référence et quelles que soient les coordonnées choisies pour repérer les événements.

Pourquoi aussi imposer à l'Espace-Temps le caractère euclidien de la géométrie habituelle ? c'est encore une restriction inutile, je dirai plus, illogique, car l'idée la plus naturelle est que les propriétés de l'Univers sont liées à ce qu'il contient; dès lors la présence de la matière doit entraîner un défaut d'homogénéité, et la gravitation doit être l'indice d'un Univers non euclidien.

L'Espace-Temps ne doit pas être régi par les lois de la géométrie d'Euclide, telles qu'on peut les étendre à un « continuum » à quatre dimensions. La vieille géométrie ne saurait suffire aux besoins du physicien, qui doit faire appel à la géométrie non euclidienne de Riemann, considérée jusqu'alors comme un pur jeu de l'esprit. De même qu'une sphère, un ellipsoïde... constituent des surfaces courbes (deux dimensions) auxquelles la géométrie plane ne s'applique pas, auxquelles on ne saurait appliquer la géométrie euclidienne sans sortir de ces surfaces, de même l'Univers (quatre dimensions) peut, par une extension de la théorie des surfaces, être considéré comine possédant une courbure.

C'est le caractère non euclidien de l'EspaceTemps qui se manifeste à nos yeux par le phénomène de la gravitation; il se traduit à nous par l'existence d'une force d'inertie qui nous a donné l'illusion d'une force attractive émanant de toute matière et agissant à distance sur toute portion de matière. La loi générale de la gravitation, qui

remplace aujourd'hui celle de Newton (et qui contient celle-ci en première approximation) exprime, sous une forme indépendante de tout choix de coordonnées, les relations entre la matière présente et la manière dont la structure géométrique de l'Espace-Temps s'écarte du caractère euclidien. Cette loi est fondamentale, car elle englobe toute la dynamique du point matériel.

La loi d'Einstein comporte actuellement trois vérifications dont le lecteur trouvera l'exposé dans l'ouvrage de M. Metz.

Loin de conduire à une complication de la Science, la théorie d'Einstein révèle une admirable harmonie, une merveilleuse synthèse des lois naturelles. Par exemple les lois générales de l'électromagnétisme dans l'Univers non euclidien, établies par Einstein, apparaissent à l'esprit comme très simples, comme plus claires encore que les lois de Maxwell qui comportent la restriction euclidienne, et dont la signification est un peu masquée par leur forme dégénérée.

M. Metz, dans son exposé succinct de la théorie, insiste particulièrement sur les questions qui ont été la plupart du temps mal comprises; il prépare ainsi le lecteur à la dernière partie de son ouvrage, intitulée Les contradicteurs et les vulgarisateurs. Je résumerai ici les points essentiels.

1o La célèbre expérience de Michelson, que la plupart des auteurs mettent en avant et présentent

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