LA SCIENCE DU BEAU ÉTUDIÉE DANS SES PRINCIPES, DANS SES APPLICATIONS ET DANS SON HISTOIRE PAR CHARLES LÉVÊQUE CHARGÉ DU COURS DE PHILOSOPHIE AU COLLEGE DE FRANCE, PRÉFACE. Les recherches sur les principes du beau et de l'art ne sont pas nouvelles en France. Au dix-huitième siècle, le P. André et Diderot les ont inaugurées chez nous presque aussitôt que Hutcheson en Ecosse et Baumgarten en Allemagne. Au commencement du siècle actuel, elles prirent dans notre pays un caractère décidément spéculatif et méthodique. Il y a quarante-trois ans déjà, le jeune successeur de M. RoyerCollard, tout plein de cette ardeur communicative et de cette puissance d'entraînement qui ont fait de lui un promoteur et un chef de doctrine, posait le problème du beau dans sa conférence de l'Ecole normale, en présence de ces élèves qui furent d'abord ses amis, T. I. a puis ses plus illustres coopérateurs. C'était en 1817 1. Un an après, en 1818, il agitait la même question devant ses auditeurs de la Faculté des lettres de Paris. Ces leçons, où l'esthétique avait dès lors trouvé ses bases les plus solides, imprimées depuis à diverses reprises et chaque fois améliorées et enrichies, forment aujourd'hui la partie la plus éclatante de ce livre sur le Vrai, le Beau et le Bien, dont huit éditions n'ont pas épuisé l'immense et légitime succès. Dans le temps où elles étaient encore inédites, l'Ecole normale ayant été supprimée et ses plus brillants professeurs disgraciés, M. Jouffroy, qui avait ouvert dans sa modeste demeure des cours particuliers où assistaient des auditeurs d'élite, tels que MM. Duchâtel, Vitet et Sainte-Beuve, aborda à son tour la question du beau. « Il l'avait toujours aimée, dit M. Damiron', il l'avait prise pour sujet de thèse en sortant de l'Ecole normale; il y était sans cesse revenu, au milieu de ses divers travaux, témoin une foule de notes qui s'y rapportent, dans ses papiers; les discussions littéraires, dont on était alors fort préoccupé, l'y ramenaient naturellement; la vive et sérieuse cu 1 Voir M. V. Cousin, Premiers essais de philosophie, 3e édition, p. 263 et 346, et le livre Du Vrai, du Beau et du Bien, préface. 2 Dans la préface du Cours d'Esthétique de M. Jouffroy, p.15. |